Hors contexte, les mots et les gestes n’ont pas de signification.
Gregory BATESON
Ordonner le monde ou le désordonner ? Décrire les parties jusqu’à l’infiniment petit ou comprendre les relations, les interactions des parties entre elles, avec les autres, le monde, l’univers ? Lier, délier, relier… Deux journées offertes par l’Institut Grégory Bateson, les 13 et 14 octobre 2012, à Paris, sur le traitement des troubles mentaux par l’approche systémique et stratégique. Deux journées, denses et menées tambour battant, à nous fabriquer des foies gras pour préparer nos voyages, nos migrations et nos apprentissages sans cesse renouvelés. Une belle brochette d’intervenants, à nous faire saliver. Pour n’en citer que quelques uns : Betty Alice Erickson, François Jullien, Giorgio Nardone, Dezsoe Birkas, Wendel Ray, Karen Schlanger. Explorons quelques moments de ce menu dégustation.
Une écologie de l’esprit
Petite incursion pour plonger dans l’univers de Gregory Bateson, biologiste, écologiste, anthropologue, cybernéticien, philosophe, et comme chacun sait, théoricien des systèmes. Le film que sa plus jeune fille, Nora Bateson, a réalisé présente des extraits des films de Gregory et de Margaret Mead à Bali et en Nouvelle Guinée dans les années 1930, des extraits d’interviews et de conférences, mais également de moments de vie qu’elle a partagés avec lui.
Dans l’ouvrage qui porte le même nom, Une écologie de l’esprit, Bateson avait engagé un dialogue entre un père et sa fille, un «métalogue». Ici, sur le même mode, c’est à sa fille de nous montrer, ou de nous démontrer, qu’il n’était pas un simple théoricien, mais qu’il appliquait, dans son quotidien avec rigueur, intégrité et humanité, les principes qu’il avait érigés et qu’il a poursuivi toute sa vie : interdépendance des êtres au sein de la nature comme des éléments au sein d’un système, respect des cultures locales, mise en perspective des relations interpersonnelles, prise en compte du système interactionnel et non du symptôme isolé, mise en évidence de l’homéostasie des systèmes, repérage des doubles contraintes... Nora, comme son père, nous invite à une certaine hauteur de vue, à nous échapper de nos contradictions, à sortir de nos visions étriquées et «pathologisantes», et à penser le monde en termes d’interrelations entre les êtres vivants. A regarder l’arbre dans sa relation avec la forêt et la forêt dans sa relation à l’arbre. Il y aurait à conclure comme Einstein que « Le monde que nous avons créé est le résultat de notre niveau de réflexion, mais les problèmes qu’il engendre ne sauraient être résolus à ce même niveau ».
Les pieds dans le plat ? Ou La psychiatrie sur la sellette ?
Edward Storms, psychiatre au Centre Hospitalier Chrétien à Liège, aux Cliniques Universitaires St Luc à Bruxelles (centre de la douleur chronique) et en privé dans cette même ville, formé à l’hypnose et à la thérapie stratégique, s’interroge : quel travail thérapeutique pour le psychiatre ? Et il s’engage sur des terrains flous et controversés.
CHRISTINE GUILLOUX
Psychologue-psychothérapeute, formateur et conférencier, formée à l'hypnose ericksonienne, à la Thérapie Brève de Palo Alto, à l'EMDR et à l'IMO et aux thérapies énergétiques tant en Europe qu'aux Etats-Unis.
Vice-Présidente de la Société Française d'Hypnose. Fondatrice de l'Institut Milton H.Erickson Centre-France. Correspondante de la Newsletter de la Milton H. Erickson Foundation de Phoenix.
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Hypnose & Thérapies Brèves : la Revue N° 29 Mai Juin Juillet 2013
EDITORIAL : AMUSANT N'EST- CE PAS ? Dr Thierry SERVILLAT
Une des attitudes fondamentales –peut-être la principale- qu’avait Milton Erickson envers la vie était d’essayer de s’amuser (to have some fun). Y compris dans son travail.
Un thérapeute qui veut s’amuser ? Paradoxe, dirons-nous très vite ! Aider, soigner l’autre est théoriquement un métier… sérieux, ne pensez-vous pas ?
Comment concevoir cela ? La thérapie aurait-elle à voir avec les Muses et la musique ? Oui sûrement, mais le mot « amuser » ne semble, contrairement aux apparences, avoir aucun rapport avec celles-ci.
POUR UN CHANGEMENT DE TYPE 3
Stéphanie GUILLOU et Dr Franck GARDEN-BRÈCHE
Rencontre de troisième type avec une infirmière en hématooncologie et un algologue urgentiste qui proposent, à partir d’une pratique laissant l’esprit rationnel de côté, une conception nouvelle du changement thérapeutique se situant dans la continuité des travaux de Gregory Bateson menés avec Paul Waztlawick, et basée sur un accueil total de l’émotion naissant de la rencontre.
L’ACCUEIL BRAS OUVERTS
POUR JOUER AVEC LES LIMITES INVERSER LE SENS.
J. de MARTINO
Variation sur le « Non !... J’déconne… » utilisé par de nombreux adolescents, le texte de l’intervention de Joël de Martino très remarquée lors des Transversales de Vaison la Romaine en 2008 est publiée en hommage à Franck Farrelly. DÉFINITIONS Déconner (v. intr.) : dire des bêtises, des inepties, ne pas être sérieux (argot) ; exagérer, divaguer, déraisonner ; plaisanter, s’amuser, faire des bêtises, se laisser aller. Etymologie (1883) : de dé-, con-, et suffixe verbal. Le sens initial érotique est vieux ou très rare ; le passage de ce sens (à celui-ci) n’est pas clair (métaphore de « sortir du vagin » ou croisement avec le sens familier : de con : « imbécile ») (Grand Robert). A noter cependant qu’on ne dit pas : « Non ! J’dévagine ! »
EN VIE JUSQU’À LA FIN, ACCOMPAGNER L’HUMAIN
Véronique LESAGE, psychologue, pratique une hypnose issue des thérapies humanistes.
Elle nous raconte le chemin fait avec Catherine, malade d’un cancer colique. Un accompagnement utilisant l’hypnose afin de répondre au mieux à l’objectif demandé par la patiente : préserver son humanité. La pratique de l’hypnothérapie s’inscrit dans un relationnel, un accompagnement singulier entre un professionnel et son patient. Je vous propose une illustration de cette dimension à travers l’histoire de Catherine D., atteinte d’un cancer. Elle est maintenant décédée, et ce témoignage est aussi une forme d’hommage qui lui est rendu. Je rencontre Catherine pour la première fois à l’automne 2008. Elle m’est envoyée pour de l’hypnose par une collègue psychologue qui chante avec elle dans la même chorale.
INTERACTIONS THÉRAPEUTIQUES ÉCLAIRAGES DÉVELOPPEMENTAUX
I. CAPPONI ; A. RAMBAUD ; J.P. COURTIAL
Dans la continuité de la réflexion systémique, la compréhension de ce qui se passe en hypnose et lors de certaines approches psychothérapiques peut s’enrichir de nombreux travaux en psychologie de l’enfant. Des recherches qui le plus souvent préexistaient à celles du groupe de Palo Alto. L’hypnose met en jeu des interactions entre thérapeutes et patients qui vont bien au-delà de la notion psychanalytique de transfert. Il en va de même pour les thérapies dites énergétiques que nous désignerons dans la suite du texte par thérapies interactionnistes. L’hypnose et les thérapies dites énergétiques mettent en jeu des objets médiateurs, concrets ou abstraits (pendule, fétiche, aiguilles, prière, etc.), que nous appellerons, à la suite de la sociologie de la traduction, acteurs réseaux, dans la mesure où ils interviennent à partir de ce à quoi ils sont associés.
Robert Montaudouin
Bernadette Audrain-Servillat
Originaire de Chartres, Robert Montaudouin a dessiné très tôt. Dans les années 70, poussé par un prof d’anglais il a durant quatre années étudié à l’Ecole des Arts Appliqués et des Métiers d’Art de Paris où il obtient un diplôme en art mural. Il continue son cursus à l’Ecole des Beaux Arts de Paris (atelier de peinture de Gustave Singier). Paris lui plaît peu. Il y travaille cependant quelques temps dans un petit atelier avant de se tourner vers le travail de la terre. Il fait un stage de potier à Besançon et s’installe comme céramiste dans la Loire en 1981. Certaines de ses oeuvres sont acquises par le musée national de la céramique de Sèvres et par le musée de Grenoble. Il pratiquera cette activité durant une quinzaine d’années. Et puis soudain, « le corps ne veut plus faire »…
HYPNO-PHILO
Procrastination(s). Dr Thierry SERVILLAT
Professeur de philosophie à Stanford, John Perry, procrastinateur lui-même (si nous le croyons) a écrit, sur un mode humoristique, un manuel qui pourra aider bon nombre de nos patients, et aussi pas mal de thérapeutes. Sur un problème souvent qualifié de « stupide », car semblant tout à fait irrationnel (nous dirons acrasique1 pour faire « branché philo grecque »), l’auteur va écrire un livre brillant, grand succès de librairie témoignant, si besoin était, de la difficulté de nos contemporains à gérer leur temps. Car il s’agit bien – je reconnais moi aussi avoir procrastiné pour avoir attendu la 16ème ligne pour le définir, de remettre à plus tard une tâche considérée comme importante. Le livre commence par un témoignage, récit d’une révélation telle celle de Saint Paul sur le chemin de Damas : l’auteur prend conscience, il y presque 20 ans, qu’il est un « procrastinateur structuré », c’està- dire « un individu capable d’accomplir beaucoup de choses tout en négligeant d’en accomplir d’autres ».
QUIPROQUO, MALENTENDU ET INCOMMUNICABILITÉ
« Trop bien ! » Dr Stefano COLOMBO
Deux mots qui sont déjà trop pour moi. J’avais déjà de la peine avec le bien et le mal, mais là ç’en est trop. Regardons de plus près et commençons par la deuxième partie, le bien. Je peux dire que j’ai du mal avec le bien alors que la langue française a du mal à me laisser dire que j’ai du bien avec le mal. C’est comme si je pouvais faire le bien un peu plus mal mais pas le mal un peu plus bien ou, si vous voulez, c’est comme si je pouvais faire le bien un peu moins bien mais pas le mal un peu moins mal. Vous conviendrez que nous ne pouvons pas dire mieux. Quand, en plus, vous apprenez que le mieux est l’ennemi du bien vous ne savez plus comment vous situer par rapport au mal. Si le mieux est l’ennemi du bien, puisje dire que le pire est l’ami du mal ?
HUMEUR
Pour une psycho-allergologie. Dr Christian MARTENS
Les médecins s’appuient sur les sciences physiques et biologiques pour expliquer les symptômes. Elles nous permettent d’en déterminer les causes et les conséquences, d’ex-pliquer, c’est-à-dire littéralement de dé-plier les signes dans une série de cause à effet. Mais par souci d’objectivité, celles-ci se refusent à s’interroger sur leur sens, sur les questions relatives au sens de ces signes, à les comprendre. Car comprendre, c’est de l’intérieur, découvrir le sens.