Sebastien LASSERRE
Thérapie EMDR-IMO.
A travers mes expériences dans des institutions comme la psychiatrie, l'aide sociale à l'enfance ou la protection judiciaire de la jeunesse, j'ai été confronté aux situations complexes et d''urgences.
Ces nombreuses expériences me permettent d'accueillir les personnes aux détresses multiples et de pouvoir répondre en m'appuyant sur plusieurs axes de travail.
Activité centrée sur les névroses, la question de l'angoisse.
Consultations 4 rue Thureau Dangin
75015 PARIS.
0660820739
https://www.doctolib.fr/psychologue/paris/sebastien-lasserre
seblaspsychologue at gmail.com
Formations Formé aux TAC au CITAC, Collège International de Thérapies par Activation de la Conscience.
Formation au CHTIP Collège Hypnose & Thérapies Intégratives de Paris, et à l'Institut IN-DOLORE.
Formation en EMDR IMO à France EMDR IMO (Laurence Adjadj & Laurent Gross)
Inscrit au Registre des Praticiens EMDR - IMO de France sous le numéro 241405016
La Thérapeute peut guérir l’insomnie
Hypnose et Tabac. Peut-on arrêter de fumer grâce à l'hypnose ? Hypnose et arrêt du tabac.
Bonjour à tous,
Il est vrai que l’arrêt du tabac peut être un véritable parcours du combattant, et l’hypnose semble en aider plusieurs d'entre nous. La démarche d’arrêter de fumer ne se résume pas qu’à la volonté ; c’est un engagement profond avec soi-même. D'ailleurs, pour ceux qui n'arrivent pas à rompre complètement, certains se tournent vers des alternatives comme les feuilles de tabac, même si cela ne règle pas le fond du problème.
Pour les intéressés, choisir un bon hypnothérapeute est essentiel, car le soutien professionnel peut réellement faire la différence. Bon courage à tous ceux qui s’engagent dans ce parcours vers la liberté !
Comprendre, désensibiliser, revivre. Hors-série de la revue hypnose et thérapies brèves sur le psychotraumatisme.
Hélène Dellucci, formatrice à EMDR Europe et spécialiste en thérapie brève centrée compétences nous fait partager son expérience de prise en charge des traumas complexes. Elle montre comment l’utilisation de la « greffe » d’une valeur appartenant à une figure symbolique permet de recréer des liens vivants, pour que le sujet retrouve une capacité à faire face au vide identitaire. Si l’EMDR classique est bien adapté à la prise en charge du stress post-traumatique, dans les traumas complexes la reconnexion à une relation vivante est indispensable avant un travail de désensibilisation.
Roberta Milanese, spécialiste de thérapie brève stratégique, nous présente la technique du ''roman du traumatisme'' pour bloquer les tentatives de solutions (essayer d’oublier le trauma, éviter les situations associées au trauma, demander aide et réconfort) qui maintiennent le pouvoir du trauma dans la vie des personnes victimes de stress post-traumatique. Cette technique nécessite l’installation préalable d’une relation de coopération entre le client et le thérapeute. En cas de trauma complexe, le roman du trauma doit être associé au blocage des tentatives de solution des troubles associés (phobie, obsession compulsive, toxicomanie, automutilation, dépression, trouble de l’alimentation, paranoïa).
Arnaud Zeman nous fait partager ses prises en charge d’enfants multi-traumatisés accueillis dans des ITEP. Il montre l’importance de s’appuyer sur un tiers-sécure pour permettre à ces enfants de rentrer en relation et de réactiver des processus de re-liaison.
Vera Likaj décrit un paradoxe lié au processus dissociatif auquel est confronté tout thérapeute : ce n’est pas parce que le patient est présent et donne son accord verbal pour un travail collaboratif qu’il arrive à faire confiance à son thérapeute. Son texte met en évidence l’importance de l’engagement du thérapeute dans la relation pour que le sujet puisse mobiliser ses ressources.
Emmanuel Malphettes l’importance de donner forme à la sensation de vide qui amène le désespoir et la perte de sens, facteurs de chronicisation. A travers la situation du deuil bloqué d’un père maltraitant, il rappelle l’importance de définir un objectif relationnel pour sortir de la répétition mortifère.
Wilfrid Martineau avec sa finesse clinique habituelle le vécu psycho-traumatique. Cette description va aider chaque clinicien à aiguiser son écoute et à repérer les éléments pertinents dans la plainte afin d’en comprendre le sens.
Emmanuel Contamin, Françoise Contamin et Laetitia de Scoutheete nous présentent les thérapies EMDR de groupe comme facteur de résilience avec des enfants et des adolescents placés, ayant vécu des violences domestiques graves. Ce travail en groupe, très utile aussi dans les situations de catastrophe, est une ressource indispensable pour le thérapeute et les différents programmes de soin lorsque l’on sait que 500 millions de personnes à l’échelle mondiale souffrent de troubles psycho-traumatiques.
Dominique Megglé nous présente son utilisation des mouvements alternatifs (MESMAY), d’autant plus efficaces qu’utilisés de manière plus hypnotique. L’EMDR doit être comprise comme une technique hypnotique complétée par le « photoshop mental » redonnant au sujet, grâce à l’hypnose, la capacité de recréer un monde plus sûr. Il donne un plan détaillé de sa pratique donnant envie de lire ou relire son livre sur le trauma.
Murielle Figureau et Alexandra Princé nous présentent leur travail avec les tremblements thérapeutiques, dans la lignée de David Berceli, inventeur de la méthode TRE. Elles décrivent la technique et illustrent leurs propos d’exemples cliniques.
Éric Bardot, concepteur de la thérapie du lien et des mondes relationnels (TLMR), et Stéphane Roy, décrivent comment sortir des situations traumatiques les plus graves pour habiter un monde humain. Ils précisent la notion de monde relationnel, son lien avec la transe thérapeutique et illustrent cette modélisation par une situation clinique expérimentée en formation.
Évelyne Josse fait le lien entre la théorie poly-vagale, l’hypnose et la co-construction de scénarios réparateurs. Cette technique déjà développée par Janet et Milton Erickson, trouve ici toute sa pertinence en lien avec les travaux de Porgès sur le système nerveux autonome.
Virginie Lagrée souligne à travers un récit très vivant l’importance pour le thérapeute de savoir accepter son impuissance. Les thérapeutes n’ont pas réponse à tout et doivent rester humbles devant le tragique de la vie.
Nicolas D’inca, chroniqueur régulier de la revue, nous présente sa pratique hypnotique dans les troubles dissociatifs de l’identité par la restauration du dialogue interpersonnel et intérieur. Il retrouve les ressources des guérisseurs traditionnels pour aider au processus de réassociation.
Clotilde Hennequin-Rivoire, élève de David Grand, promoteur du brain-spotting, nous montre comment la recherche d’un point oculaire, où le patient se sent moins perturbé et calme dans son corps, est un puissant activateur de ressources pour contacter les parties dissociées.
Nous remercions tous ces collègues de nous avoir transmis le vif de leur expérience pour permettre à chacun de trouver de nouvelles voies ou approfondir celles que nous utilisons dans ces situations si douloureuses et retrouver confiance dans le lien humain..
Crédit Photo © Xavier Montoy
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FORMATEURS et SUPERVISEURS CERTIFIES EMDR IMO. - Laurence ADJADJ: Psychologue, Psychothérapeute, Présidente de France EMDR IMO ® et de l'Institut HYPNOTIM.
- Laurent GROSS: Psychothérapeute Certifié par ARS en 2013, Kinésithérapeute, Vice-Président de France EMDR IMO ®, Président du CHTIP Collège d’Hypnose et Thérapies Intégratives de Paris et de l'Institut IN-DOLORE
- Dr Pascal VESPROUMIS: Médecin Addictologue, Président de l'ACCH. Anime les supervisions.
- Dr Roxane COLETTE: Médecin Psychiatre, auteur du livre: Petits maux, grands traumas: de l’EMDR à l’IMO, une nouvelle voie de guérison.
- Sophie TOURNOUËR: Psychologue, Psychothérapeute, Thérapeute Familiale et de Couple. Anime les supervisions.
- Claire DAHAN: Psychologue, Psychothérapeute. Conférencière internationale.
Brainspotting, accès et retraitement des mémoires traumatiques. Réparer les cerveaux pour guérir.
Le Brainspotting était né !
« La direction de votre regard influence la façon dont vous vous sentez », voici la devise centrale du Brainspotting. Je vous invite à en faire l’expérience... Pensez à un événement qui vous perturbe, même légèrement... prenez le temps de l’évoquer, vous y plonger en pensée, le rendre présent... puis identifiez la façon dont votre corps y réagit, la sensation physique ou émotionnelle associée (une respiration plus courte ou oppressée, la gorge qui se serre, une tension dans le dos, une boule au ventre...), évaluez-en l’intensité... notez-la selon l’échelle SUD de 0 à 10, puis déplacez votre regard sur votre gauche, évaluez à nouveau... portez votre regard en face de vous, évaluez... déplacez votre regard à droite, évaluez... et notez les différences. Voici un cas clinique de traitement d’un trauma récent pour illustrer les applications cliniques de la thérapie Brainspotting (BSP).
Après avoir frôlé la mort
Je reçois Jean, qui consulte suite à un accident ischémique transitoire (AIT), expérience où il a senti s’approcher la mort de très près, une expérience de mort imminente (EMI). Jean, la cinquantaine, a une stature de colosse : 1,90 mètre pour plus de 100 kilos. Le fauteuil dans lequel je le reçois disparaît sous l’immense carcasse de géant. Dernier garçon d’une fratrie de cinq garçons, il a été élevé sur le mode « sois un homme, un pur, un dur ; ne pleure pas, les émotions c’est pour les filles ». Dans son milieu, l’émotionnel n’a pas droit de cité, le ressenti est syno nyme de danger. Quand il évoque ce qui l’amène, je l’entends affirmer « tout va bien, ça va aller, je me vois avec ma femme, assis dans le jardin, on va s’en sortir... ». Il semble n’avoir aucune conscience de l’émotionnel qui l’anime, son mental prétend que tout va bien mais son corps hurle le contraire : son souffle est court, son dos voûté, les épaules s’enroulent vers l’avant, tout son corps se recroqueville, se ratatine dans le fauteuil, les traits du visage sont crispés...
Alors je laisse ses pensées pseudo-salvatrices tenter de le rassurer tout en l’invitant à porter son attention sur ces sensations dans son corps, notamment sa difficulté à respirer, sa poitrine oppressée... et de bien noter que son regard fixe un point sur le meuble juste derrière moi... et continuer de fixer ce point tout en s’autorisant à sentir ses sensations corporelles... à laisser venir ce qui doit et ce qui peut venir, comme la sensation physique qui change, une émotion, une image, un souvenir, une pensée, une question... sans rien vouloir, sans rien espérer, sans rien imaginer de ce qui peut se présenter mais en observant sur toutes ces dimensions... Voici une des façons de mettre en place le cadre d’une séance Brainspotting.
On note la similitude avec l’hypnose dans l’accueil sans restriction des sensations et l’accompagnement flottant de l’attention, qui favorisent les émergences spontanées et la transformation de l’expérience interne. Lors de cette première séance, les yeux de Jean se sont posés naturellement sur un point dans l’espace, ce qu’on va nommer en Brainspotting, un Gazespot : point de fixation naturel et intuitif par lequel le regard est attiré en raison de l’ouverture cérébrale qu’il crée. On peut également rechercher intentionnellement ce point particulier du champ visuel : le Brainspot. En séance, après avoir identifié l’activation (qui n’est pas forcément de la perturbation mais « ça bouge, ce n’est pas tranquille »), le patient en évalue l’intensité à l’aide du SUD (Subjective Units of Distress, qui induit déjà l’idée que SUD 0 existe, que la guérison est possible). Une fois repérée la sensation physique associée, on va à la recherche du spot : à l’aide d’un « pointeur » (sorte d’antenne rétractable munie d’un embout coloré), on balaye la totalité du champ visuel, d’abord sur l’axe horizontal... et on s’arrête là où on détecte une réponse réflexe, et/ou le patient perçoit non pas que la sensation est plus intense mais où il la sent de façon plus fine, avec plus d’acuité... puis on précise la position en explorant l’axe vertical.
En état de pleine conscience ciblée, en présence
On invite alors le patient à se mettre en pleine conscience dans une triple attention : focalisée sur ses pensées, ses sensations physiques/ émotionnelles, et la fixation du spot. Avoir longtemps travaillé en périnatalité m’a appris à percevoir l’état des bébés à travers les indicateurs subtils que sont la posture, le souffle, la tonicité, un velouté de peau qui se modifie, l’humidité du regard, un clignement d’oeil, un signe de déglutition, un rythme de respiration, l’amplitude du souffle... Sans négliger le récit cognitif, on écoute ainsi chez nos patients tout ce que le verbal ne dit pas, et on accède aux mémoires traumatiques par le biais des réactions physio - logiques du système nerveux. Une fois identifié le Brain spot, j’invite Jean à entrer en état de pleine conscience ciblée, à porter son attention sur ses expériences internes (émotions, sensations, images, pensées...), à faire appel à ses capacités d’intéroception.
Le voici dans un état d’attention double, comme en EMDR : « un pied dans le passé », dans le souvenir de l’événement traumatique, ET « un pied dans le présent », conscient de ce qui se passe dans son corps dans l’ici et maintenant. Avec toute sa curiosité, sans rien espérer, sans même imaginer de ce qui va se présenter, sans rien vouloir, sans rien pouvoir. Comme l’archéologue qui ne sait pas à l’avance ce qu’il va découvrir... juste observer. Moi-même en pleine conscience focalisée à la fois sur son processus et sur mes propres ressentis. Il m’arrive en effet d’être activée des mêmes ressentis concomitamment à ceux du patient : cela m’informe sur son état, ce qu’il traverse. Un état qui mobilise les capacités de « présence » du thérapeute, qui nécessite d’être pleinement relié à son « sentiment de base » (Frans Veldman en haptonomie), ancré dans le vagal ventral (théorie polyvagale). D’après Milton Erickson, « le thérapeute lui-même entre dans un état de transe nécessaire quand il focalise toute son attention sur le patient et sur ses manifestations verbales ou non verbales » (3).
Est-ce cet état de transe ou le partage d’un état de transe commun qui favorise une plus grande activation des neurones miroirs et le processus de contre-transfert limbique qui voit la congruence des sensations physiques et émotionnelles communes au patient et au thérapeute, qui favorise l’empathie, et la guérison ? Cette qualité de présence qui faisait que François Roustang par sa seule présence mettait les patients en état hypnotique ? Présence commune, nécessaire à nombre d’approches thérapeutiques, puisque c’est dans la présence que se tisse la relation. Révélé par une étude sur l’efficacité des thérapies : quelle que soit la technique utilisée, ce qui soigne c’est la relation. Notre domaine est la thérapie du lien : lien du patient avec le thérapeute, lien avec son monde extérieur, ses liens familiaux, amicaux... lien du patient avec lui-même, son monde intérieur, et ses parties dissociées.
En accordage
Un de s f ondement s du Brainspotting est le processus de double attunement que l’on peine à traduire en français par « accordage », comme des instruments de musique qui s’accordent, vibrent sur la même fréquence ; référence à l’accordage mère-nourrisson de Daniel Stern où la mère détecte et déchiffre les signaux (dans le non-verbal), suit le rythme et les besoins fluctuants du nouveau-né, se synchronise à lui. Le Dr Christian Zaczyk parle de syntonie (du grec suntonos qui résonne en accord), synto nisation thérapeute-patient qui les met sur la même longueur d’onde (2). David Grand insiste sur l’importance du double accordage : accordage corps-cerveau chez le patient (à son propre système interne, ses parties dissociées), accordage thérapeute-patient dans la relation. Dans cet accordage, par le biais des neurones miroirs, le cerveau de Jean s’appuie sur les capacités de mon cerveau à s’autoréguler pour se réguler lui-même... ma capacité à rester dans le vagal ventral, ma connexion au Self (selon le modèle Internal Family System
- IFS) pour amener Jean dans son propre ventral, rester dans son Self afin de traverser les activations émotionnelles et traumatiques. Ainsi le trauma se résout grâce à la Présence et l’accordage. La double syntonie auquel l’IFS a ajouté un troisième accordage, celui du thérapeute avec lui-même, à l’écoute de ses propres ressentis, dans l’ouverture, sans rien prévoir, sans imaginer où le patient va aller, vers quoi il va évoluer, où va l’emmener le voyage.
Faire confiance au principe d’incertitude
« L’essentiel de ce qui se passe à l’intérieur d’un individu est inconnais - sable » (1). Ce qui nous amène cette troisième notion chère à David Grand, l’incertitude.
A l’opposé des thérapies stratégiques où le praticien provoque ce qui se passe, prévoit une approche spécifique pour chaque problème, prend l’initiative, en Brainspotting il n’existe pas de protocole, d’étapes prédéfinies, de procédure à suivre. Evelyne Josse le dit aussi, « le protocole rassure le thérapeute mais il est une entrave à l’intuition clinique et à la créati - vité », tout ce qui est prédéterminé s’oppose au principe d’incertitude et détourne de l’accordage affectif intuitif, et donc perturbe le processus créatif de guérison du patient (1). Le thérapeute BSP reste ouvert, curieux, dans une approche phénoménologique. David Grand utilise cette métaphore : le processus de guérison du patient est comme une comète, et nous thérapeutes devons être « dans la queue de la comète » : ni devant à diriger, ni trop loin derrière, « désaccordés ».
C’est « le patient qui mène et le thérapeute qui suit » (1). Parce que même si l’on est expert de la technique, celui qui reste expert de sa problématique (et donc de ses solutions) c’est celui qui s’assoit dans le fauteuil qui nous fait face. C’est pourquoi on travaille avec le principe d’incertitude et sans aucun présupposé. S’il n’y a pas d’incertitude, il n’y a pas d’accordage. En Brainspotting, seul l’imprévu est toujours certain. Dans ces séances, le thérapeute fait confiance à son intuition et sa créativité, ce qu’il perçoit qui va être ajusté à ce que le patient attend, demande... en total accordage. Il se tient dans une posture d’un « savoir être » plus que d’un « savoir faire ». De même François Roustang dans Savoir attendre y développe « ses capacités d’attention, de sérénité et de silence pour attendre, se retenir d’en faire trop, rechercher ou proposer une solution, il se place dans une attention à l’autre, sans intention, sans prétention, une attente ouverte par la curiosité de laisser les choses se faire ». Dans les séances avec Jean, j’interviens très peu, car en intervenant je risque de contrarier ce principe d’incertitude, de casser l’accordage et donc de perturber son processus naturel et spontané de guérison, et tandis qu’il traverse émotions, sensations, impressions... la séance se déroule le plus souvent dans le silence, un silence habité de nos présences.
Brainspotting Ressource et Dissociation
Lorsque Jean revient à la deuxième séance, il demande à travailler sur le souvenir de l’AIT. A l’évocation de cet événement, Jean est débordé,…
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Clotilde HENNEQUIN-RIVOIRE Psychologue. Après une carrière de vingt ans comme graphiste illustratrice, elle opère une reconversion professionnelle et obtient un Master2 PCPP (Psychologie clinique Psychopathologie et Psychothérapie) à l’IED Paris 8, suivi d’un DU de Psychiatrie périnatale à Paris 7. Praticienne en haptonomie, thérapeute EMDR accréditée en 2014, elle a été formée au Brainspotting en 2015 par David Grand en personne. Après avoir travaillé en PMI et en maternité, elle exerce maintenant en libéral.
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- Dr Roxane COLETTE: Médecin Psychiatre, auteur du livre: Petits maux, grands traumas: de l’EMDR à l’IMO, une nouvelle voie de guérison.
- Sophie TOURNOUËR: Psychologue, Psychothérapeute, Thérapeute Familiale et de Couple. Anime les supervisions.
- Claire DAHAN: Psychologue, Psychothérapeute. Conférencière internationale.
Technique or not technique? Dans le cortège des souffrances aux urgences.
- Claire : « Je ne me sens pas à l’aise du tout avec ce genre de situation, je ne suis pas formée, ça m’angoisse.
- Collègue infirmier : C’est quoi ? s’enquiert un autre infirmier.
- Claire :Monsieur Pierre, 55 ans, chauffeur poids lourd depuis trente ans. Il vient de voir s’encastrer une voiture sous ses roues, sans rien pouvoir faire, un virage, glissant... Il est super mal... Ce sont les pompiers qui l’ont emmené.
- Collègue infirmier : C’est un débrief. Je n’aime pas trop non plus ces entretiens. Moi, je me suis formé sur le tas, à force d’en voir. » J’écoute d’une oreille en refermant ma boîte mail. Formée, je le suis. Et pourtant... Je fais rapidement le tour de ma boîte à outils, HTSMA (Hypnose Thérapies stratégiques et Mouvements alternatifs), Thérapies narratives, TRE (Trauma Releasing Exercises), débriefing et jeux de rôles lorsque je faisais partie de la CUMP (Cellule d’urgence médico-psycho - logique), entendu parler aussi du Brainspotting, lu le livre de David Grand. Pas une expérience sur laquelle m’appuyer ne me revient... Je suis de garde une nuit et j’étais en formation HTSMA la semaine précédente. Je reçois une jeune femme, Agnès, victime d’un accident de la voie publique. L’accident vient d’arriver, elle est en larmes, très angoissée, sa réaction reste adaptée mais elle est très envahie, elle revit en boucle l’accident. Elle répète : « J’aurais dû freiner, j’aurais dû freiner... »
Scène insoutenable qu’elle me raconte avec moult détails, je me disais que cela aurait pu être moi, c’est cela aussi les consultations de psychotraumatisme, c’est cette identification permanente, « on y laisse des plumes », comme le disait mon infirmier à Claire. Je me souviens d’un soir où tous mes col - lègues des urgences et moi-même avions scellé notre télévision le soir même après avoir reçu un père qui venait de perdre sa fille de 2 ans écrasée sous le poste. C’est l’effet « osmotique » du trauma, comme une imprégnation. Mais cela n’est-il pas surtout un signe d’engagement de la part des soignants, un accordage affectif lors de l’entretien ?
A propos de l’impact sur les soignants, je me rappelle avoir croisé mes collègues du Samu revenant d’une intervention dans un parc d’attractions pour enfants. Le wagon d’un manège mal fixé est passé sur le corps d’un animateur, décédé. Ils s’arrêtent dans le couloir, hilares, ils me montrent les photos : « Mate la scène, une boucherie, c’était le festival du gore ! » Ils sont manifestement très dissociés. Je les invite à venir prendre un café au secteur psychiatrique, avec l’idée d’un débriefing informel. On a parlé un peu, bu du café beaucoup, le temps que tout le monde se rassemble, se réassocie.
Aucune technique, juste un retour dans l’ici et maintenant. Quand mon fils m’a demandé d’organiser son anniversaire dans ce même parc, j’ai refusé. L’impact est à libération prolongée, semble-t-il. Je ne sais plus ce que j’ai fait ou dit à Agnès, rien de mirobolant sûrement, mais encore moi-même un peu sidérée j’ai eu besoin d’en parler à mon maître, le Docteur Martineau.
- « Tu as fait de l’EMDR ? me demande-t-il.
- Comme ça, là, en aigu ?!
- Ben oui !
- J’y ai pensé oui, mais je n’ai pas osé.
- Alors tu préfères laisser des gens souffrir plutôt que de tenter ce que tu as appris par peur de te planter ? »
Cette réplique m’est restée coincée dans la gorge et le coeur... Evidemment qu’il aurait fallu tout tenter, peu importe d’être ridicule. Je décide d’emmener Claire avec moi voir Monsieur Pierre. Il entend les bruits de freinage, les pneus qui crissent, il revoit les yeux de la conductrice, un regard tout aussi démuni que le sien.
- M. Pierre : « C’est comme si elle était résignée à mourir, dit-il.
- Thérapeute : Je pense à ses enfants, son mari, quel âge peut-elle avoir ? Pas plus de trente ans je pense... Il me demande des nouvelles de la victime, si elle est arrivée aux urgences, comment elle va.
- M. Pierre : Je voudrais au moins savoir si elle est vivante ou morte.
- Th. : Je vais me renseigner. Je sens le regard étonné et éloquent de Claire se poser sur moi.
- Claire : Quand je pense au nombre de fois où tu nous rappelles de faire attention au secret professionnel ! » C’est sorti tout seul, Claire, je n’ai pas réfléchi, c’est cela qui lui semblerait le plus utile, là, tout de suite, à ce patient, alors sans rentrer dans les détails médicaux je vais lui donner des nouvelles à Monsieur Pierre. Je me suis retrouvée à lui annoncer qu’elle était malheureusement décédée. Je me souviens de recevoir Patricia, jeune fille, qui me raconte avoir été violée quinze jours auparavant. Elle est dévastée par l’angoisse, entend les paroles de son violeur en boucle, revoit les images de la scène en flashs intempestifs, vit dans un état d’hypervigilance anxieux permanent, évite le trajet habituel de retour chez elle, sursaute quand son grille-pain éjecte ses tartines le matin. Après moult hésitations, je me lance, me souvenant de la réflexion de mon maître. A quoi sert de se former sinon ? Je me rappelle que lors d’agressions physiques il vaut mieux éviter de toucher, ou alors demander l’autorisation, alors je lui demande de suivre mon doigt, et c’est parti pour une série de mouvements alternatifs.
- Th. : « C’est comment en vous là, maintenant ?
- Patricia : Ça va nettement mieux ! Mouvements alternatifs encore. - Patricia : Ah oui, vraiment, c’est bien là...
- Th. : Restez avec cela... Mouvements alternatifs de nouveau. - Patricia : Je vous assure ça va très bien », insiste-t-elle, s’agaçant presque. Je me suis doutée que cette patiente fort gentille essayait juste de me faire plaisir et de me rassurer, ou bien que cela était tellement insupportable pour elle de reparler du traumatisme qu’elle a préféré en finir vite, éviter de s’y confronter. Probablement, je n’ai pas réussi à obtenir une alliance suffisamment solide pour l’autoriser à lâcher prise et se sentir en sécurité. J’aurais dû prendre le temps d’installer une place sûre, et pourquoi pas utiliser une échelle afin de vérifier son niveau de sécurité. Autre souvenir, autre expérience : Chantal, la meilleure amie d’une jeune fille disparue, retrouvée violée dans un fossé, arrive aux urgences dans un état de dissociation majeure, pouvant la mettre en danger. Une instabilité psychomotrice incontrôlable, des pleurs, des cris, des attitudes désadaptées, elle se tape la tête contre les murs. Il a fallu « l’anxiolyser » et la garder aux urgences au moins une nuit afin de revoir les choses après un temps d’apaisement provoqué par les médicaments. Il y a encore quelques années je ne me posais pas la question, je donnais du Xanax ou du Valium avec un résultat qui ne m’aurait pas fait changer d’avis. « Les benzodiazépines sont contre-indiquées dans les PTSD », m’ont appris mes internes ensuite. Sont recommandés : antidépresseurs inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et bétabloquants. Nous n’avons ni l’un ni l’autre aux urgences psychiatriques car il s’agit de traitements essentiellement prescrits lors d’un suivi, ce que nous n’assurons pas. Il nous faut donc essayer de trouver une consultation post-urgence rapidement.
C’est ce qu’il se passe avec cette patiente, chauffeuse de taxi, prise lors d’une de ses courses dans un règlement de comptes entre narcotrafiquants et qui a vu deux hommes cagoulés tirer sur son véhicule à la kalachnikov. Je parviens à lui trouver un rendez-vous en libéral dans la semaine qui suit. J’ai appris qu’elle s’y était rendue une fois puis n’avait pas honoré le second rendez-vous. Alors comment accrocher les patients quand on doit les ré-adresser alors que l’on sait que l’on est la « première figure d’attachement » après un choc ? Comme Julie, victime d’une agression sexuelle alors qu’elle rentrait d’un dîner entre amis et allait reprendre sa voiture. Julie est déjà venue dans le service après l’examen gynécologique initial, il y a quatre jours. Dissociée, elle avait refusé de rester, disant qu’elle allait retourner travailler à la crèche dans laquelle elle est employée depuis un mois et que tout irait bien, qu’elle était entourée de ses amis, elle ne voulait pas parler à ses parents de l’agression. Je n’avais pas d’argument pour la garder de force à l’hôpital et le service débordait de patients plus ou moins instables et agités qui l’inquiétaient encore davantage. Là encore, je lui ai fait promettre de revenir si elle en avait besoin. Elle revient ce jour. Elle a besoin d’un justificatif pour son employeur car elle n’a pas réussi à retourner travailler. Elle se sent trop honteuse et sale. Elle répète : « Je n’aurais pas dû mettre de jupe ce soir-là... » Elle est en demande de réassurance sur le fait que « ça va revenir, ça va aller ». « Je suis quelqu’un de joyeux d’habitude... »
J’ai pu grâce à ce patient avoir un regard sur l’étendue des remaniements psychiques que peut impliquer un traumatisme...
Pour lire la suite de cet article de la revue...
Dr Virginie LAGRÉE Praticien hospitalier aux urgences du CHU de Nantes. Formée à l’hypnose à l’ARePTA à Nantes ainsi qu’aux thérapies stratégiques, à l’HTSMA et aux thérapies narratives.
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NDLR L'HTSMA fait suite à l'EMDR et précède la TLMR Thérapie du Lien et des Mondes Relationnels.
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- Laurent GROSS: Psychothérapeute Certifié par ARS en 2013, Kinésithérapeute, Vice-Président de France EMDR IMO ®, Président du CHTIP Collège d’Hypnose et Thérapies Intégratives de Paris et de l'Institut IN-DOLORE
- Dr Pascal VESPROUMIS: Médecin Addictologue, Président de l'ACCH. Anime les supervisions.
- Dr Roxane COLETTE: Médecin Psychiatre, auteur du livre: Petits maux, grands traumas: de l’EMDR à l’IMO, une nouvelle voie de guérison.
- Sophie TOURNOUËR: Psychologue, Psychothérapeute, Thérapeute Familiale et de Couple. Anime les supervisions.
- Claire DAHAN: Psychologue, Psychothérapeute. Conférencière internationale.
Les scénarios réparateurs. Un système nerveux autonome plein de ressources.
1. Le trauma sous l’angle de la théorie polyvagale
Pour mieux comprendre le traumatisme psychique, commençons par nous pencher sur la théorie polyvagale. Elle décrit les réactions graduelles du système nerveux autonome en réponse au niveau de risque détecté dans l’environnement et explique les conditions nécessaires à sa régulation, fournissant ainsi de précieuses pistes thérapeutiques au praticien éclairé. Le système nerveux autonome régit les grandes fonctions vitales et viscérales de l’organisme. Jusqu’à récemment, on considérait qu’il était composé de deux voies : le système sympathique, également appelé orthosympathique, et le système parasympathique. Les recherches ont conduit le neurologue américain Stephen Porges à affirmer que le système parasympathique est lui-même scindé en deux branches, une branche ventrale (partie ventrale du nerf vague et nerfs crâniens III, VII, IX) et une branche dorsale (partie dorsale du nerf vague) (Winter & Tyree, 2016). Selon sa théorie, dénommée théorie polyvagale (de poly, plusieurs, et vagal, du nerf vague), le système nerveux autonome est organisé hiérarchiquement en trois niveaux : le parasympathique ventral, le sympathique et le parasympathique dorsal. Outre ses fonctions végétatives, le système nerveux autonome analyse constamment, sans le concours du conscient et sans l’intervention de processus cognitifs, le niveau de risque d’une situation. C’est ce que Porges nomme « neuroception ». En réponse au niveau de risque détecté, notre système nerveux autonome provoque des réactions automatiques : activation du vague ventral lorsque nous sommes en sécurité, du sympathique lorsque nous sommes en danger, et du vague dorsal lorsque notre vie est menacée. Illustrons ces réactions par un exemple.
Le vacancier fait une mauvaise rencontre
Imaginons un vacancier sur une plage. Il est en sécurité. Il se sent serein et détendu. La branche ventrale de son nerf vague est activée de manière prédominante. C’est dans ce « mode ventral » qu’il possède le plus large éventail de comportements, de ressources cognitives (capacité de concentration, de compréhension, d’apprentissage, de raisonnement et de rationalisations, créativité, etc.), de ressources d’engagement social (empathie, désir d’échanger avec autrui, capacité à venir en aide à un tiers et à l’apaiser, etc.) et de capacité à éprouver des sensations et des émotions positives (bien-être, joie, calme, etc.). Après la sieste, il décide d’aller piquer une tête. Il est motivé et enthousiaste. Son système sympathique s’active afin de fournir à son corps l’énergie dont il a besoin pour mener à bien cette activité agréable. Il est en sécurité et son système ventral prédomine, régulant l’activité du sympathique. En sortant de l’eau, il réalise que la marée monte à vive allure.
S’il ne court aucun péril dans l’immédiat, la situation exige toutefois qu’il réagisse sans délai. Il est un peu nerveux et légèrement tendu. Son système sympathique se mobilise et prend le contrôle (mobilisation). Il presse le pas et ramasse à la hâte ses effets personnels abandonnés sur le sable. C’est alors que son chemin croise celui d’une bande de voyous aux intentions manifestement malveillantes. Il se sait en danger et prend peur. Son système sympathique se suractive. Son organisme se prépare à l’action et sécrète des hormones de stress. L’heure n’est plus à l’apprentissage, à la créativité, à la compréhension ou à l’empathie. Seule compte la survie. Il détale (fuir), mais les vauriens le rattrapent. Rageur, il distribue des coups de poing à la volée (combattre). Progressivement, il s’épuise, sans plus nourrir l’espoir d’une issue favorable. Il continue à combattre, mais ses gestes sont exécutés machinalement (réaction automatique). Il n’est plus tout à fait lui-même et la situation lui paraît irréelle (dissociation). Son système sympathique reste hyperactivé, mais la branche dorsale du nerf vague est désormais recrutée. Soudainement, un de ses agresseurs exhibe une arme et la lui pointe sur la tempe.
La victime voit sa dernière heure venue. A quoi bon se démener ? Le combat est perdu d’avance. L’hyperactivation du sympathique, soutenant les capacités de son organisme à lutter, est devenue inutile. Le sympathique décroche et la branche dorsale du nerf vague prend la main (hypoactivation). Sous la tutelle du parasympathique, ses battements cardiaques ralentissent et sa tension artérielle décroît. La diminution de l’afflux de sang au cerveau lui procure une impression de flou et une sensation de confusion. Il n’éprouve plus d’émotions, à moins peut-être de la tristesse, du découragement ou du désespoir. Il ne ressent plus de douleur ou si peu. Peut-être finit-il par s’évanouir... Les réponses du système nerveux central sont progressives et successives. Il est impossible de passer du « mode ventral » au « « mode dorsal » sans passer par le « mode sympathique ». Inversement, une personne ne peut sortir du « mode dorsal » et revenir au « mode ventral » sans passer par l’échelon sympathique. Cette compréhension doit guider l’hypnothérapeute dans la séquence des transformations à opérer au niveau des réminiscences traumatiques.
Nous avons choisi de représenter l’activité du système nerveux central sous la forme d’une pyramide inversée. Sa large base représente l’éventail de capacités et de ressources disponibles en « mode ventral ». Cellesci se restreignent au fur et à mesure que l’on descend sur l’échelle neuro - végétative en réponse au niveau de danger.
2. Le trauma sous l’angle de la reconsolidation de la mémoire
Les chercheurs en neurosciences ont démontré qu’un souvenir est modifié à chaque évocation. Il est ré-encodé avec le nouveau contexte dans lequel il a été rappelé et est reconstruit à la lumière des besoins et des connaissances du présent. De nombreuses études ont d’ailleurs prouvé qu’il est possible de modifier les souvenirs suite à leur réactivation (Winocur, Moscovitch, 2011 ; Nader, Schafe, LeDoux, 2000b ; Sara, 2000). Ces récentes découvertes offrent une assise scientifique aux méthodes hypnotiques proposant une modification des réminiscences traumatiques dans le but thérapeutique de libérer les patients de leur symptomatologie post-traumatique (Josse, 2023).
3. La thérapie des traumas par les scénarios réparateurs
La méthode du scénario réparateur s’attache à élaborer une reconstruction subjective des événements traumatiques en y introjectant les ressources dont le patient a été privé au moment des faits. Dans ce type de mise en scène, l’idée de souffrance passive est totalement absente. Les symptômes, les émotions douloureuses et les cognitions négatives de la victime sont imputés à l’événement dramatique tandis qu’une autre partie, constituée des zones psychiques restées intactes du souffle traumatique, est identifiée à la lutte qu’elle mène contre cette influence. Cette conception rejoint le modèle de la « dissociation structurelle de la personnalité » développée par Onno van der Hart et ses collaborateurs au début des années 2000. Selon ce modèle, une menace majeure peut provoquer une dissociation aboutissant à une organisation psychique particulière dans laquelle coexistent différents sous-systèmes psychobiologiques de la personnalité. La PE, partie émotionnelle de la personnalité, bloquée dans l’expérience traumatique, est constituée d’expériences sensorimotrices douloureuses et chargée d’affects pénibles. La PAN, partie apparemment normale de la personnalité, assume les tâches nécessaires à la vie quotidienne et à la survie de l’espèce.
4. Remonter l’échelle polyvagale
L’exposition à la scène traumatique n’est pas souhaitable dans tous les cas. C’est au thérapeute que revient la responsabilité. Lorsque l’exposition au souvenir traumatique suscite des peurs incontrôlables, le thérapeute doit ralentir le rythme afin de maintenir les réactions du patient à un niveau supportable qui n’interfère pas avec le réapprentissage et préférer des techniques telles que les métaphores et les histoires thérapeutiques.
Pour accompagner et proposer des scénarios réparateurs adaptés, il est essentiel que le praticien comprenne sur ce qui a fait trauma. Les émotions exprimées par le patient sont des pistes précieuses. La colère, le sentiment d’impuissance et les sentiments de culpabilité indiquent généralement qu’il n’a pas pu se défendre ou défendre un tiers ; la peur signale le plus souvent le manque de protection ou le défaut d’outils cognitifs (incompréhension de la situation au moment de faits, situation tragique vécue comme permanente) ; la honte témoigne habituellement du fait de n’avoir pas pu se défendre ou d’avoir été déshumanisé (humilié, traité comme un objet).
Une fois l’état hypnotique induit, le thérapeute amène le patient à retrouver la situation délétère en disant, par exemple : « Lorsque ce sera le bon moment pour votre inconscient, il vous ramènera au moment de l’agression. Vous êtes dans la rue, vous marchez, vous entendez des pas derrière vous... » Pour l’accompagner au mieux, il est important qu’il sache rapidement ce qui se passe pour lui. Aussi, pose-t-il des questions telles que : « où êtesvous ? », « que se passe-t-il ? », « que faites-vous ? ». Si la vie de la personne a été jalonnée de nombreux événements adverses, il est utile de lui demander son âge. En effet, l’intervenant ne peut être certain du moment que va connecter le patient ayant subi des maltraitances répétées, même s’il l’a orienté vers un souvenir précis. Lorsque le rappel du trauma provoque une régression en âge, le thérapeute veille à s’adresser à cette partie en adaptant ses propos, sa tonalité et son vocabulaire à l’âge expérimenté par son patient. Il est, par exemple, conseillé de tutoyer l’enfant et de continuer à vouvoyer le patient adulte.
L’intervenant aide son patient à identifier les ressources qui lui ont fait défaut au moment critique et l’encourage à transformer la scène traumatique en y injectant les solutions choisies. En priorité, le scénario doit le soustraire au danger vital et lui assurer sécurité physique et protection (neutralisation du danger, personne-soutien, protectrice et introduisant des valeurs essentielles telles que la morale, le respect, la justice, etc.). Il peut ainsi commencer à sortir du « mode dorsal » et remonter d’un échelon sur l’échelle polyvagale. Dans un second temps, le patient doit pouvoir sortir du figement, dépasser l’impuissance et retrouver du contrôle (capacité ou possibilité d’action et de réaction), c’est-à-dire passer du « mode dorsal » au « mode sympathique ». Dans une troisième étape, il doit être sécurisé affectivement et émotionnellement (réconfort, respect, compassion, empathie par une personne bienveillante, moyens habituels de régulation des enfants tels que jouer, se promener, raconter une histoire, etc.). Cette étape de régulation permet au patient d’activer le « mode ventral ». Au besoin, dans une quatrième phase, de la compréhension et du sens (outil cognitif) pourront être introduits afin de permettre une restructuration cognitive par un changement d’interprétation de la situation.
Prenons le cas d’une personne maltraitée dans l’enfance par son père. Le premier scénario pourrait, par exemple, mettre en scène un grandpère qui la soustrait au danger ; un deuxième pourrait faire intervenir une grand-mère pour la réconforter ; un troisième pourrait permettre à la fillette de se défendre après être devenue ultrapuissante grâce à l’ingestion d’une potion magique ; et dans un quatrième, l’adulte qu’elle est devenue pourrait venir expliquer à la petite fille qu’elle n’a pas à se sentir coupable, le seul ayant commis des actes répréhensibles étant son père. Le thérapeute accompagne le patient dans la traversée de chaque scénario jusqu’au moment où il sait que l’événement a pris fin et qu’il a survécu.
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EVELYNE JOSSE
Psychologue, psychotraumatologue, chargée de cours à l’université de Metz (UL) et chargée de cours en formation continue à l’Université Libre de Bruxelles (ULB). Elle a fondé le DIU en hypnose à l’ULB et à l’UL. Elle enseigne l’hypnose aux professionnels de la santé et dispense des cours en psychotraumatologie. Auteure d’ouvrages sur le traumatisme psychique et sur l’hypnose. Elle gère le site www.resilience-psy.com et la chaîne YouTube Resilience Psy.
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PARIS: Formation à l’Hypnose Médicale en Douleur Chronique. 1ère Session.
Objectifs :
- Acquisition des techniques d’hypnose et de communication thérapeutique utilisables sur les symptômes douloureux, les pathologies chroniques et les syndromes anxieux, en médecine et kinésithérapie.
- Intégration de ces techniques avec les autres approches antalgiques utilisées en pratique journalière.
- Développement d’une stratégie thérapeutique dans la prise en charge des symptômes douloureux, des troubles anxieux ou psychosomatiques chroniques.
- Optimisation de la relation soignant / soigné.
- Optimisation du confort du soignant face aux situations difficiles.
Public:
Médecins libéraux ou hospitaliers, Rhumatologues, Médecins Rééducateurs, Médecins du Sport, Kinésithérapeutes, Ostéopathes, Psychomotricien.ne.s, Ergothérapeutes et aux Infirmier.e.s.
Moyens Pédagogiques:
Exposés théoriques. Démonstrations et Analyses. Mises en situations pratiques supervisées, en petit groupe. Etudes de cas cliniques. Supports vidéo et documentation.
Particularité de la Formation:
Au cours de toute la formation, vous bénéficierez de l’enseignement, à chaque session, de 2 enseignants et de « facilitateurs » pendant les situations pratiques, afin d’assurer un meilleur suivi pédagogique.
Objectif: à l’issu de ces 3 premiers jours de formation, l’étudiant sera capable de mener une séance complète simple, et de pouvoir l’intégrer à sa pratique professionnelle.
Pré-requis: Cours théoriques fournis en amont, à consulter avant la première journée.
Jour 1
Présentation de la formation: objectifs et déroulement. Présentation des participants, évaluation de leurs attentes et objectifs.
Thèmes:
- Introduction de la formation par Laurent Gross Psychothérapeute et Kinésithérapeute, et Florent Hamon Infirmier Anesthésiste, sur l’apport de l’hypnose dans leur pratique professionnelle quotidienne.
- Historique de l’hypnose en médecine. Evolution des pratiques avec les données scientifiques actuelles.
- Apports de l’hypnose ericksonienne et ses concepts adaptés à l’hypnose médicale.
Mises en situation avec les 12 consignes de base de la communication hypnotique.
Thèmes :
- Apprentissage du langage dit « hypnotique » et de la communication thérapeutique.
- Premières notions de ressources, métaphores et confusion.
Jour 2
Thèmes:
- Renforcement des connaissances et des techniques acquises lors de la 1ère journée de formation.
- Les différentes inductions, suggestions directes, suggestions indirectes.
- Plan d’une séance type depuis le premier contact jusqu’à la fin de la consultation…et le futur proche.
- Notions de préparation conversationnelle afin de favoriser l’utilisation de l’hypnose lors d’un geste douloureux.
Méthode et outils : Mises en situation pratique par des exercices.
Thèmes: - Premières notions d’autohypnose pour le praticien. Nathalie Vieira.
- Transposition et mise en situation dans le cadre de la rhumatologie et des professionnels de santé concernés par la rééducation physique.
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Méthode et outils:
- Mises en situation pratique : Savoir mener une séance.
- Récapitulatif de la journée
- Asseoir ses acquisitions et préparer la prochaine journée.
Jour 3
Thèmes: "La 1ère Séance", avec Claire Dahan, Psychologue Clinicienne:
- Permettre de se mettre en lien avec la demande réelle du patient.
- Favoriser une affiliation de qualité en s’appuyant sur certains outils de la thérapie brève orientée solution.
- Affiliation qui pourra soutenir une exploration fine du monde de la personne et de la représentation qu’elle a de son problème.
- Définir l’objectif du patient de manière la plus précise possible en observant ce à quoi ressemblera sa vie lorsque le problème sera dissolu.
Pratique :
Méthode et outils
- Mises en situation pratique par des exercices. - Vidéo - Démonstrations.
- Savoir mener une séance complète. Démonstrations.
- Asseoir ses acquisitions et préparer la prochaine session.
Méthode et outils : - Mises en situation pratique : Savoir mener une séance complète. Démonstrations.
- Asseoir ses acquisitions et préparer la prochaine session.
Inscription sur notre Catalogue
10 Cité Joly du 07/10/2024 00h00 au 09/10/2024 23h50
https://in-dolore.fr/douleur-chronique_a/
La «greffe mythique» en psychotraumatologie. HS18 de la Revue Hypnose & Thérapies Brèves: Le Psychotraumatisme.
Tout dépend de vos compétences en Hypnose et Approches Centrées Solution, si vous utilisez quotidiennement ces outils, si vous êtes à l'aise avec, alors la formation 3 jours sera suffisante.
Rdv sur https://www.formation-emdr.fr/formation_emdr_3j/
Par contre, même si vous êtes professionnelle de santé mais que vous ne maniez peu ces outils, ou même pas encore, alors la formation en EMDR IMO sur 8 jours sera la meilleure pour vous.
https://www.formation-emdr.fr/formation_emdr_8j/
Bien cordialement.
Laurent GROSS
Vice Président de France EMDR IMO
Psychothérapie: Annuaire psychothérapies, psychothérapeutes
Avez-vous regardé sur l'annuaire https://www.hypnose-therapie-breve.com/ ?
Bien cordialement
Laurent GROSS
EMDR et MESMAY, regarder le traumatisme en face.
L’EMDR (« Eye Movement Desensitization and Reprocessing ») est efficace dans deux tiers des cas de traumatisme, comme l’ont démontré de nombreuses études. C’est en 1987 que Francine Shapiro a découvert cette thérapie surprenante par les mouvements oculaires alternatifs, d’abord sur elle-même qui venait d’être traumatisée par une annonce médicale catastrophique, puis sur des anciens combattants hospitalisés pour névrose de guerre. Pour étayer le succès de son approche, cette littéraire se forme en psychologie, notamment aux thérapies comportementalo-cognitives (TCC) et devient membre du l’Institut de recherche mentale de Palo Alto. Shapiro bâtit un protocole de traitement inspiré de ceux des TCC, avec, entre autres, bilan pré et post-thérapie, échelles d’évaluation (des cognitions et des émotions), établissement d’une ressource de secours, formulaire de consentement éclairé (1). Nul doute donc que cela ne corresponde aux canons scientifiques exigés par l’époque, avec un protocole alourdi en conséquence, ce qui rend la méthode crédible.
La diffusion de l’EMDR est rapidement mondiale. En 2002, elle reçoit le prix Sigmund-Freud de psychothérapie. Mais quelle est la base de l’EMDR ? Dans l’EMDR, le sujet doit suivre des yeux les doigts du thérapeute qui font devant ceux-ci des allers-retours droite-gauche - droite-gauche plusieurs centaines de fois, pendant qu’en même temps il doit se concentrer sur l’image mentale du traumatisme (désormais appelée « la cible »). En fait, c’est de l’hypnose. Pourquoi ? Parce qu’on demande au sujet de réaliser simultanément deux tâches impossibles à effectuer simultanément, et on le demande comme une évidence. En effet, on ne peut pas se focaliser à la fois sur l’extérieur de soi et sur l’intérieur de soi, sur le dehors et sur le dedans, sur les doigts et sur la cible. Cette suggestion est un paradoxe typiquement hypnotique. En hypnose, il est habituel de charger le sujet de plusieurs tâches simultanées impossibles à faire en même temps. Comme on le demande comme une évidence, l’esprit conscient ne se méfie pas, très vite décroche et les mécanismes réparateurs de l’esprit inconscient peuvent se mettre librement en route.
Tout l’appareil d’allure scientifique dont s’entoure l’EMDR n’est qu’une ruse, volontaire ou involontaire, pour faire accepter cette suggestion comme rationnelle par les patients et les thérapeutes alors qu’elle est parfaitement irrationnelle. D’ailleurs certains sujets entrent ainsi rapidement dans une transe profonde. Comme méthode d’induction, les allers-retours de doigts rappellent l’utilisation ancienne du métronome pour produire l’état hypnotique. Il est essentiel de comprendre que l’EMDR est de l’hypnose pour deux raisons. La première est qu’avec quelques simples aménagements, on peut la rendre encore plus efficace parce qu’encore plus hypnotique (MESMAY). La seconde est que si l’EMDR réussit dans deux tiers des cas, elle échoue dans un tiers. Dans cette situation, l’EMDRiste pur, celui qui vient des TCC et ne connaît que cette approche du traumatisme, est coincé, tandis que le praticien d’hypnose passe tout bonnement à une autre méthode hypnotique de traitement (MHIM ou Photoshop mental).
L’EMDR permet de faire faire au sujet un virage à 180 degrés sans qu’il s’en rende compte...
Aujourd’hui donc, tous les hypnotistes utilisent les mouvements alternatifs des yeux en première intention, parce que cette technique est hypnotique, marche dans deux tiers des cas et permet le recours à une autre approche hypnotique en cas d’échec, autre approche dont elle facilite l’emploi parce que le sujet s’est déjà habitué à regarder son traumatisme en face. L’EMDR contient en effet une deuxième ruse, plus profonde, qui est la source réelle de son efficacité. Elle permet de faire faire au sujet un virage à 180 degrés sans qu’il s’en rende compte. Pendant qu’il suit les doigts des yeux, il oublie qu’il ne fuit plus l’événement qui l’assaillait et qu’il fuyait sans cesse. Maintenant, il le regarde en face plusieurs centaines de fois de suite en l’appelant « la cible ». Or, une cible, on tire dedans. Ainsi le sujet n’est plus passif, a repris de l’action sur l’imagerie mentale du trauma, est sorti de son sentiment d’impuissance et il est guéri. C’est finalement à cela que servaient le déguisement d’allure scientifique de la méthode et le paradoxe hypnotique des deux tâches impossibles simultanément.
2. MESMAY, l’EMDR pour les nuls.
Le protocole de l’EMDR est lourd. La séance est longue : 60 à 90 minutes. Pour tenter de diminuer les 30 % d’échecs, la technique reçoit des sophistications de plus en plus nombreuses (plus ou moins grande vitesse de défilement des doigts et autres). Celles-ci font perdre de vue la ruse essentielle que je viens de décrire en s’égarant dans des voies alambiquées peu probantes. Ou bien, pour expliquer les échecs, on élabore la notion de « traumatismes complexes », pour impliquer que leur traitement sera complexe. Il n’y a pas de traumatisme complexe ; il est là ou il n’est pas là, intense ou modéré, avec des complications ou non, facile à diagnostiquer ou non. Le traumatisme est toujours simple, seuls les thérapeutes peuvent être complexes. Enfin, le terme EMDR est « labellisé ». Il existe une école officielle d’EMDR qui interdit à ceux qui ne s’y sont pas formés en son sein d’utiliser le terme, sous peine de poursuites légales.
Il n’y a pas de traumatisme complexe, il n’y a que des thérapeutes complexes
Voilà pourquoi il m’a paru important de recentrer la technique sur la ruse hypnotique essentielle, de la simplifier en la potentialisant grâce à une communication plus efficace. J’ai donc considérablement appauvri l’EMDR. J’appelle cette approche MESMAY. Cet acrostiche partiel qui veut dire « Mes Mouvements Alternatifs des Yeux » est une blague faible, comme je les aime. Puisque chacun y va de son sigle, j’y vais du mien ! Autre blague faible permise par la première mais qui plaît aux patients à qui je déclare :
« Le traitement du traumatisme, c’est MESMAY ; alors on va faire ça avec MESMAY ». Au début, ils pensent que je parle de leur grand-mère. Une séance habituelle de MESMAY dure vingt minutes, parfois trente. Elle comprend un prologue, deux actes séparés par un entracte et surtout pas d’épilogue.
Prologue 1. On explique brièvement la technique, en quelques mots. Etre concis est important. On indique au patient que si, en cours de route, il est fatigué, on pourra faire une pause. On ne parle que de fatigue oculaire, de rien d’autre. 2. On définit la cible. Elle doit être la pire image mentale du traumatisme, vraiment la pire parmi toutes. Ce n’est pas dangereux car nous ne demandons pas au patient de revivre l’événement mais seulement de travailler une image. D’autre part, quand elle sera désactivée par le traitement, le sujet ne pourra pas nous dire qu’il y avait pire encore. Les autres images seront forcément moins graves. Nous ne risquons pas ainsi de nous laisser embarquer dans d’autres séries de MAY. Le traitement sera terminé. 3. On prévient le patient que la séance finie, on se quittera sans se parler pour que le cerveau fasse son travail au mieux. Cette discrète théâtralisation sert à ce que le sujet prenne totalement confiance dans l’importance de ce qui vient d’être fait avec succès.
Acte I
Le thérapeute se met de trois quarts par rapport au patient pour ne pas être dans son champ de vision. Il lui demande de se concentrer mentalement sur la cible tout en suivant les index et majeur collés ensemble du praticien que celui-ci balade de droite à gauche et inversement devant ses yeux. Le rythme de poursuite oculaire impulsé doit être assez…
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Dr Dominique MEGGLÉ Ancien psychiatre des Hôpitaux des Armées, en pratique libérale depuis 1997. Cofondateur de la CFHTB, président de l’Institut Erickson Méditerranée et président d’honneur de l’Institut Erickson de Normandie. Conférencier et formateur, il est l’auteur de plusieurs livres, dont : Erickson, hypnose et psychothérapie (Retz, 2005), Les Thérapies brèves (Satas, 2011), Douze conférences (Satas, 2011), Le traumatisme mental, signes, diagnostic, traitement (Satas, 2021), Les chaussettes trouées (Satas, 2023).
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MARSEILLE: 2ÈME ANNÉE SESSION 1: HYPNOSE ET SEXO-THÉRAPIE BRÈVE ORIENTÉE SOLUTION
Intégration des thérapies brèves avec l’hypnose
Cette deuxième année se déroule sur 12 journées soit 84 heures
Session 1
Présentation des axes de travail en sexologie
Comment aborder certaines pathologies sexuelles avec l'hypnose ?
Thérapies Brèves Orientées Solution
Rappels et définitions, outils non spécifiques, les règles princeps de la TOS, la reformulation et l'écoute du patient, motivation, anticipation, objectif, recadrage, compliment.
Technique : les 5 stratégies Ericksoniennes : Fragmentation /Progression / Distraction/ Réorientation / Utilisation / Les stratégies minimalistes / -- L’accompagnement des résistances.
La thérapie orientée sur la solution, le travail de Steve de Shazer: orientation solution et ressources, position relationnelle, utilisation des compliments, des exceptions, questions miracles, tâches thérapeutiques...Cette formation se déroule une fois par an
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11 Impasse Flammarion Centre Le Mistral du 30/09/2024 00h00 au 02/10/2024 23h50
https://www.formation-hypnose-marseille.info/A-Marseille-Formation-Hypnose-2eme-annee_a21.html
«Nous sommes une personne multiple». Pluralité d’esprits dans le Trouble dissociatif de l’identité (TDI). Revue hypnose thérapies brèves.
Quelques mots sur le TDI
Le TDI est un trouble dissociatif complexe. Les études s’accordent sur un taux de prévalence du TDI de 1 à 3 % en population générale (1). Seule - ment 6 % seraient diagnostiqués (Kluft, 2009), en raison des nombreuses co-morbidités, d’une méconnaissance des professionnels et d’un masking volontaire ou non de la part des patients. Selon les critères diagnostics du DSM-V, il est caractérisé par la conscience de plusieurs états de soi alternants (alters), qui possèdent chacun leurs propres vécu, perception, relation et réflexion sur l’environnement et soi-même. Au moins deux de ces identités ou états de personnalité prennent de façon récurrente le contrôle du comportement de la personne. C’est pourquoi on a longtemps parlé de « personnalités multiples » avant de préférer insister sur la « dissociation de l’identité ». Cette discontinuité du vécu associée à des amnésies importantes non causées par des substances permet la définition du TDI. Nous souscrivons à l’hypothèse de Frank Putnam (1989) qui a décrit la dissociation comme « un processus normal qui est utilisé initialement à titre défensif par un individu pour gérer des expériences traumatiques, et qui évolue avec le temps vers un processus mal adapté ou pathologique ». Le point de départ n’est qu’une des variantes adaptatives possibles en réponse au trauma. Nombre d’experts font l’hypothèse que des identités alternantes proviennent de l’incapacité des enfants traumatisés à développer un sens unifié de soi. Ainsi la dissociation dans l’enfance peut servir comme une modalité de résilience développementale, en dépit des graves perturbations psychiatriques ultérieures qui caractérisent les patients souffrant de TDI (2).
Le patient TDI est une personne singulière qui se vit comme ayant des identités alternantes, séparées, qui ont une autonomie psychologique relative les unes par rapport aux autres. A divers moments, ces « sujets » peuvent prendre le contrôle exécutif du corps et du comportement de la personne et/ou influencer son vécu et comportement de l’intérieur. Prises ensemble, toutes les identités alternantes forment l’identité ou la personnalité de l’être humain avec un TDI. C’est ce qu’on appelle un « Système ». Même si selon la définition du terme « ensemble d’éléments considérés dans leurs relations à l’intérieur d’un tout fonctionnant de manière unitaire », ce sera plutôt un résultat thérapeutique qu’un point de départ, dans le cas du TDI. Les alters font partie d’un système, le switch étant le changement d’état de conscience. Le front est l’état de présence où telle identité vient au devant de la scène psychique et peut contrôler le corps. Le reste du temps, les alters existent dans le headspace ou innerworld, l’espace mental ou le monde intérieur. L’inner est un espace psychique ayant fonction de contenant, où les alters peuvent vivre et interagir.
Un ensemble d’esprits
Le TDI est un diagnostic interculturel dont la validité est comparable ou supérieure à celle d’autres diagnostics psychiatriques reconnus. Cependant, on note que des altérations de l’identité et/ou de la conscience peuvent se manifester dans d’autres cultures sous la forme d’une possession spirituelle et d’autres syndromes d’esprits multiples (3). Le TDI est un trouble dont les manifestations peuvent varier et être plus ou moins adaptées suivant les cultures. Ce point nous intéresse, notamment parce que l’étude d’autres cultures non-occidentales aborde le cas de la multiplicité selon un angle qui ne pathologise pas leur porteur. La conscience y est vue d’emblée comme un système relationnel complexe, un espace de médiation entre plusieurs présences issues de différents règnes. La capacité de se déplacer entre plusieurs états de conscience ou « mondes » internes et de fluctuer entre plusieurs identités y est vue comme normale. Tout comme le fait de communiquer avec les arbres ou les animaux. Les personnes désignées comme expertes de la transe sont même valorisées et reconnues.
Le chamanisme laisse grand-place à cette pratique dissociative qui advient de manière volontaire et utile à la communauté, dans le cadre de la cure (pouvoir) ou de la recherche d’informations (savoir). En effet, une compréhension centrale que les peuples animistes ont en commun est le fait de penser l’être humain comme un ensemble d’esprits. Non pas un « individu », mais bien un ensemble de relations qui oeuvrent dans l’invisible, pouvant entraver ou soutenir la personne dans sa vie. Le chaman peut à loisir « devenir autre » et se vivre comme une entité surnaturelle qui voyage en esprit vers d’autres domaines de la réalité, les mondes spirituels, puis qui va réintégrer son corps et sa personne ordinaire. Le changement d’état est ici sain et cloisonné par des pratiques rituelles, dans un but thérapeutique. Son travail est ensuite d’intégrer les visions qu’il a acquises chez les « esprits » à la vie de tous les jours. Il verra alors ses alter ego en état de transe comme ses alliés invisibles une fois revenu en état de conscience ordinaire. Il a appris à communiquer avec ces parts non humaines librement et en connaissance de cause. Son sens de l’identité reste intact.
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NICOLAS D' INCA Psychologue clinicien, hypnothérapeute. Méditant de pleine présence pendant vingt ans, aujourd’hui orienté sur la pratique des états modifiés de conscience, notamment la transe chamanique. Passionné des formes de guérison alternatives, étudie les cultures traditionnelles et spirituelles du monde pour aller vers une thérapie intégrative. Après douze ans en institution, se consacre à ses activités libérales à Fontainebleau, en ligne et dans divers lieux de formation.
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- Dr Pascal VESPROUMIS: Médecin Addictologue, Président de l'ACCH. Anime les supervisions.
- Dr Roxane COLETTE: Médecin Psychiatre, auteur du livre: Petits maux, grands traumas: de l’EMDR à l’IMO, une nouvelle voie de guérison.
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Vécus de détresse et de déliaison chez l’enfant en ITEP. Revue hypnose et thérapies brèves.
Accompagner des enfants de six à quatorze ans dans les instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques (ITEP et DITEP, en dispositif) du secteur médico-social est une expérience troublante. Ayant des parcours de soin inhabituels (avec des hospitalisations), souvent accom - pagnés par des services de la protection de l’enfance, ces enfants âgés de quelques années ont pour la plupart traversé des épreuves et des expériences de vie douloureuses. Ces enfants expriment leurs difficultés et leur détresse par l’expression corporelle, par l’agressivité et par les comportements transgressifs. Ces manifestations ne peuvent pas laisser indifférent, elles font du bruit, elles sont visibles, elles interpellent. Bien qu’il soit difficile de savoir ce que ces enfants ont réellement traversé, tant ils sont peu loquaces concernant leur courte histoire de vie, le fait d’observer leurs manifestations et d’être attentif à ce qui se joue dans la relation permet d’identifier cette grande détresse. Les profils de ces enfants sont hétérogènes et il serait difficile de constituer un ensemble les rassemblant tous, tant ils sont différents. Toutefois, il n’est pas rare de rencontrer des enfants meurtris et cabossés, des enfants agités et perturbés par des histoires composées de propos insultants ou discréditants, d’actes inquiétants ou violents, comme s’ils avaient traversé un maelstrom de signes en contradiction, de perturbations, d’éclats, de chocs et d’inconfort. Cela construit chez eux une certaine conception ou vision du monde, ils sont « dans leur monde » comme on dit parfois, un monde traversé par des histoires de maltraitance, d’abandon et de chaos.
Les histoires de vie de ces enfants prennent des formes multiples, mais elles sont souvent organisées autour de la notion de survie. Du fait de ce maelstrom, les processus de sécurité relationnelle sont perturbés et une difficulté à être en lien s’installe, l’inquiétude et le repli s’immiscent, pour laisser place à un monde de méfiance et de peur. Leur réseau relationnel s’appauvrit et il tend à se réduire de plus en plus.
L’expression de cette grande détresse chez ces enfants s’exprime par l’agir plutôt que la parole (et encore moins d’élaboration) et par l’agressivité plutôt que par l’explication ou le dialogue. Quoi qu’il en soit, le plus souvent la problématique de ces enfants ne s’articule pas autour d’un ou de plusieurs événements identifiés, que l’enfant pourrait verbaliser et organiser en un tableau de type traumatique ; il est néanmoins difficile de ne pas y songer.
Raphaël en proie à un chaos intérieur
Raphaël est un enfant qui arrive dans l’établissement avec un air un peu hagard, comme s’il avait été déposé là par erreur, comme si son passage s’avérait temporaire et qu’il allait rapidement retourner chez lui ou ailleurs. En observant Raphaël, la singularité de cet enfant apparaît : un regard bleu clair et perdu, un visage rond et peu expressif, une manière de parler avec des phrases incomplètes faites de trous et une prononciation très approximative. Parmi d’autres traits de sa personnalité, on peut s’arrêter sur sa focalisation massive concernant le football qui le conduit à annoncer régulièrement aux adultes un nombre de buts improbable : « j’ai marqué 68 buts au dernier match », qui obtient comme seule réponse de ce dernier un visage passif et incrédule.
Plusieurs difficultés (un retard scolaire important, une vision du monde décalée et des histoires difficiles à comprendre) conduisent l’équipe à envisager une réorientation en IME. Toutefois, à la suite d’une évaluation cognitive, la surprise fut grande lorsque les résultats ont mis en évidence l’absence de « retard intellectuel » !
Un aspect marquant de son comportement est celui d’entrer ponctuellement et sans prévenir dans des états de rage qui nécessitent systématiquement l’intervention de plusieurs adultes afin de l’arrêter, tant la violence hétéro et auto-agressive est importante. Dans ce moment, Raphaël semble hors de lui, totalement inaccessible, en proie à un mécanisme qui le dépasse et semble tout emporter sur son passage : une sorte de tsunami intérieur qui explose à l’extérieur. A la fin de la première crise qui a duré probablement une heure, composée de cris, de larmes, de sueur et d’insultes, il finit par s’endormir. Lors d’une énième crise, je suis appelé par les éducateurs. En arrivant, les hurlements et les tensions sont extrêmes. Toutefois les éducateurs parviennent à le maintenir de manière à ce qu’il ne blesse personne, ni autrui, ni lui-même. Comme les autres fois, je m’approche de lui afin de chercher à entrer en lien, à établir une connexion, tant Raphaël est hors de lui dans ces moments-là.
Pour y parvenir, je lui demande l’autorisation de mettre une main sur son épaule. Les cris se poursuivent mais à un moment Raphaël profère une insulte violente : « je vais la tuer cette p... de Sylvie ». Il s’agit de son enseignante, heureusement absente de la pièce. Je me saisis de cette phrase et lui demande : « c’est qui cette p... ? », afin de rester sur le même canal de communication. Il m’indique que c’est l’enseignante et précise dans un hurlement qu’il veut la tuer, et brusquement il se jette en avant comme pour joindre l’acte à la parole. Je poursuis en lui disant :
- Thérapeute : « OK, tu veux la tuer, et alors, que va-t-il se passer ensuite ?
- Raphaël : Je vais la tuer, je vais la tuer.
- Th. : Oui, j’ai compris, tu vas la tuer. Et après ? Il se passe quoi après ? Pour toi ? (mes phrases sont courtes et ma voix est forte afin de rester au plus proche de son registre de communication).
- Raphaël : Je serai tranquiiiiiille. Je serais tranquiiiiiille quand j’aurai tuer cette p...
- Th. : OK, donc tu vas la tuer pour être tranquille ?
- Raphaël : Ouiiiiii ! (en hurlant, et premier message positif).
- Th. : OK, donc tu veux être tranquille ?
- Raphaël : Ouiiiiii ! (proche du précédent).
- Th. : OK, tu as le droit de vouloir être tranquille. C’est ça que tu veux, être tranquille ? (répétion volontaire).
- Raphaël : Ouiiiiii !
- Th. : OK, et ce sera comment dans ton corps ?
- Raphaël : Bien, je serai tranquille.
- Th. : Je comprends. » A partir de ce moment, Raphaël s’apaise un tout petit peu et on com - mence à entamer un échange légèrement plus construit. A l’intérieur de la crise, Raphaël est pris dans un monde vide de liens, dans lequel l’autre se dérobe, s’éclipse. Ce n’est pas tant que Raphaël s’en détourne, mais plutôt qu’il n’a plus accès à la relation, l’autre s’absentant et devenant inaccessible. Dans ce monde structuré par la déliaison, Raphaël est hors de lui, dans une sorte de chaos, où la violence du comportement et du verbe fait écho à un monde de destruction, dont le thème principal est le meurtre. Un chaos extérieur qui cherche à traduire un chaos intérieur.
La personne qui vient à Raphaël n’est pas une personne rassurante mais 37. bien au contraire une personne agressive, voire persécutrice. Ce qu’il est important de repérer, c’est que si l’accès à ce tiers est refusé à l’enfant, en disant par exemple « je t’interdis de parler ainsi de ma collègue », aucun tiers ne peut venir et l’enfant est dans l’impossibilité de retrouver un lien, quelqu’un, un autre, même si cet autre se situe sur le registre de l’agressivité ou du combat. C’est à partir de cette figure, même agressive, qu’un retour à une relation dans le présent est possible. Depuis ce chaos, c’est lorsqu’arrive un début de lien, un fil, une voix, ou toute autre forme de tentative de reliaison ou de connexion, même imperceptiblement, que Raphaël parvient à attraper ce fil et à sortir tout doucement de ce monde chaotique (on pense au fil d’Ariane dans le dédale).
Cette présentation de la situation de Raphaël exprime clairement la dimension chaotique de ce dans quoi il se perd, que l’on peut appeler les « mondes chaotiques » ou les « mondes traumatiques », où l’absence de lien au monde et à l’autre en constitue les critères et les déterminants. Comment Raphaël est-il entré dans ce monde ? Comment un tel monde peut-il recouvrir le monde commun et relationnel au point de ne plus percevoir la présence d’autrui, de ne plus sentir son propre corps, au point d’être envahi par un monde de destruction ? S’il ne s’agit pas nécessairement d’un événement traumatique particulier, en tout cas Raphaël est entré dans un monde traumatique, qui se révèle lors de la crise.
Aline et Sophie en manque de tiers sécure
La première fois que j’ai rencontré Aline, c’était au sortir du véhicule qui la ramenait du foyer dans notre établissement ITEP. Elle est sortie visiblement très mécontente, jetant son sac au sol en disant : « c’est de la merde ! ». Elle s’éloigne du véhicule et déambule en continuant à s’agiter avec agressivité. Elle ne me connaît pas et en me voyant, elle m’a personnellement salué en me disant : « t’as une tête de chien ». Je lui ai tout de même dit « bonjour » et j’ai décidé de lui parler le moins possible, à distance, en l’observant, vigilant à ce qu’il n’y ait pas d’incident. Elle continue ainsi à se mettre à l’écart, lançant des insultes aux personnes qui l’ont déposée et qui, sur mon invitation, repartent. Les insultes se portent alors sur un peu tout : là où elle est, une porte, une fenêtre, un arbre. Elle jette son manteau à terre et marche dessus, elle saute négligemment dans les flaques d’eau et recouvre ses souliers de boue. Aline s’affirme, c’est le moins que l’on puisse dire, elle semble révoltée, sans concession, rejetant ciel et terre d’un même élan. Sans le savoir, elle semble avoir une attitude littéralement « punk » (genre musical rock : agressif et radical). Plus tard, des éléments d’histoire sur Aline mettent en évidence un placement en foyer en rapport avec des faits de maltraitance au domicile et de soupçons d’abus par le père….
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ARNAUD ZEMAN Psychologue clinicien. Psychologue en libéral. Psychologue en ITEP (Institut thérapeutique, éducatif et pédagogique). Formateur en hypnose ericksonienne à l’Institut Milton Erickson de Nantes (ARePTA), à la Faculté de Psychologie de Nantes et au DU d’hypnose. Superviseur.
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Votre communication sur les réseaux sociaux
J'accompagne beaucoup de thérapeutes dans leur communication. Être visible sur Google bien sûr mais les réseaux sociaux ne sont finalement qu'une petite vitrine.
Partage : Se faire connaitre en tant que thérapeute
Livres du mois. Revue hypnose et thérapies brèves 72.
Dans le fauteuil de l’hypnose, Marc Galy, Erès. Dans la préface de cet ouvrage, Philippe Delerm écrit : « Ressentir et rien d’autre. Ne pas juger. Mais être là, profondément, dans un ailleurs qui devient ici... » Marc Galy, médecin anesthésiste, responsable de la consultation d’hypnose médicale à l’hôpital Saint-Louis à Paris, enseignant au DU de la Pitié-Salpêtrière, nous décrit l’importance de l’installation du corps dans le fauteuil pour développer un espace de liberté ouvrant un autre chemin. Un livre dans lequel on retrouve la finesse des analyses de son auteur.
Marc Galy anime une Masterclass sur François Roustang, “la feuille blanche”, la Présence, l’Attente et le Silence.
René Girard. Biographie, Benoît Chantre, Grasset Enfin une biographie complète sur la pensée d’un des plus grands penseurs français du XXe siècle, créateur de la théorie mimétique. René Girard, auteur de livres majeur s (Mensonge romant ique et vér i té romanesque, La violence et le sacré...) a été le co-organisateur du célèbre colloque de Baltimore en 1966 qui a fait connaître les penseurs français (Derrida, Lacan, etc.) aux USA. Cette biographie intellectuelle se lit comme le roman d’un siècle de bruit et de fureur.
Comptes rendus par Sophie COHEN
La communication, ça soigne et ça se soigne, Laure Watelet, Pauline Antoine, Satas C’est une bande dessinée. La première sur cette thématique tellement répandue et importante : la communication thérapeutique. Les dessins sont très plaisants, Pauline Antoine a exercé son art, elle a su saisir et mettre en scène les situations les plus courantes rencontrées sur le terrain de l’hôpital. Le contenu est présenté avec humour. Trouver résumés ainsi les concepts essentiels sous forme de mise en situation est intéressant pour tous ceux qui découvrent et s’attachent à progresser dans nos relations. Je ne peux que vous recommander de lire cette BD unique en son genre.
Accompagner la mort et le deuil : une approche pratique pour le milieu hospitalier, Christiane Steffens-Dhaussy, Satas Nous sommes tous confrontés à un moment ou à un autre à la mort. Que ce soit dans l’accompagnement de nos patients en activité libérale ou en activité hospitalière. La fin de la vie pose toujours de nombreuses questions aux soignants et à l’entourage familial ou professionnel de la personne concernée. Dans cet ouvrage, beaucoup de situations cliniques sont exposées. L’auteure nous livre son expérience et nous en fait profiter au travers de ses écrits. La lecture terminée, vous vous sentirez certainement confortés dans certaines de vos pratiques ou questionnés par rapport à celles-ci. La culture et les pratiques autour du deuil sont abordées. Le burnout également. Des pratiques hypnotiques sont proposées. On se laisse facilement accompagner par ce livre.
Silhouette mon amie, mon ennemie. Comprendre et aimer son corps à l’heure des réseaux sociaux, Dr Dominique-Adèle Cassuto, dessinatrice Titeepex, Editions de La Martinière Jeunesse. Un livre qui s’adresse aux adolescents, c’est plutôt rare. On le constate souvent, les adolescents sont sensibles à leur imag e . Cette période fragile de la vie valait bien un livre con sacré à la question de la maigreur ou du surpoids. Illustré, l’ouvrage se lit facilement, il comporte des tas de petits témoignages qui le rendent vivant. Il comprend également des tests et des conseils. Il n’empêche que le fond est solide, documenté. Enfin un livre qui parle des réseaux sociaux, et en particulier comment s’en protéger. Le sujet des influenceurs est abordé. Des numéros d’appel, des sites d’informations utiles et des vidéos du Dr Cassuto sont accessibles en flashant un QR code. A mettre entre les mains de tous les ados qui se posent des questions sur leur silhouette et qui souffrent de la comparaison de leur corps réel par rapport au virtuel.
« Give up » et dépression. Recadrage et conversation d'engagement.
QUELQUES RAPPELS SUR LES ÉLÉMENTS PSYCHOGÉNÉTIQUES DE LA DÉPRESSION
Dans la dépression, le patient se sent victime des autres, du monde, ou de ses illusions ; tout ce qu’il essaie de faire pour remettre de l’ordre dans sa relation aux autres, au monde, ou à lui-même, est vain et ne conduit qu’au désespoir. Il essaie de corriger par des tentatives de solution : éviter de penser au futur et à l’effondrement, contrôler encore plus lui-même, le monde et les aut res. L’échec va le mener au désespoir. A la fin, il ne lui reste plus qu’à « laisser tomber ».
UN PARADOXE
Depuis que je suis amené à suivre des patients dépressifs ou « burnout », je me suis senti bloqué par un paradoxe. La dépression est-elle une réaction passive ou bien un comportement actif ? S’agit-il de bloquer un ensemble de conduites automatiques pathologiques ou bien s’agit-il de mettre fin aux conséquences dramatiques d’un choix délétère ?
Pour Giorgio Nardone, la réaction de défense principale de la dépression est le « give up » que l’on traduit généralement par « laisser tomber ». Toutefois cette traduction ne met pas suffisamment en évidence ce côté actif du « give up » (différent du « give in » passif). L’impuissance et le désespoir amènent les dépressifs à avoir une attitude constante : ils laissent tomber (« give up »), ce qui les amène à jouer le rôle de la victime et, conséquemment, à prendre l’entourage en otage. Il apparaît donc justifié d’entraîner cette personne à abandonner le fait de jouer la victime et à casser le cercle vicieux de prise d’otage de l’entourage. Avec « up » il s’agit d’abandonner, de laisser tomber, de rendre, de sacrifier quelque chose : c’est une action. Ainsi, si le patient laisse tomber la lutte, c’est un choix actif, beaucoup plus délibéré qu’il n’y paraît, un moyen de défense actif. Pourtant nos patients dépressifs donnent l’impression que tout leur est tombé sur le dos, tout a totalement dépassé leurs capacités, si bien que le comportement dépressif leur apparaît comme une pure réaction sur laquelle ils n’ont aucune prise.
COMMENT LES AMENER À PENSER QU’ILS N’ONT PAS CAPITULÉ MAIS QUE, AU CONTRAIRE, ILS ONT SUSPENDU LE COMBAT D’UNE MANIÈRE DÉLIBÉRÉE ?
Vous imaginez bien que si votre patient dépressif prend en compte l’aspect actif de son système de défense, c’est toute sa représentation de lui-même qui va basculer du mode passif au mode actif. Sa propension à coopérer activement dans le soin augmentera d’une façon très importante. Peut-être même que, au lieu de se contenter de céder à la pression des autres pour faire telle ou telle activité, au lieu d’appeler à son aide : « il faut que... », il lui sera plus facile de repérer des moments à l’occasion desquels il a pu dire : « je fais cela ou j’ai fait cela ». Dans ce renversement de sa posture, tous les moyens de défense utilisés apparaîtront actifs. C’est ainsi que les plaintes, les ruminations, les comparaisons, les efforts, les évitements lui apparaîtront comme des stratégies délibérées de protection, vis-à-vis desquelles il peut envisager un espace de liberté suffisant pour pouvoir les modifier ou même les arrêter. En effet, vous savez tous que se plaindre, ruminer, se comparer aux autres, faire des efforts ou bien évoquer les « il faut que », éviter toutes sortes de situations, sont des tentatives de solutions inefficaces qui ne servent qu’à entretenir le problème. Parmi celles-ci, certaines sont devenues automatiques, que ce soient les ruminations, les constructions de scenarii négatifs, la perte des intérêts, l’incapacité d’anticiper. Elles sont tellement devenues automatiques qu’elles sont devenues des symptômes caractéristiques de l’état de maladie.
Lorsque vous aurez montré à votre patient combien une seule de ses stratégies est active et délibérée, il sera beaucoup plus enclin à reconsidérer l’ensemble de ses moyens de défense et, petit à petit, à prendre en compte combien chacun de ces comportements, même s’il est devenu automatique avec le temps, a été au début un comportement décidé ou une action délibérée. Alors, me direz-vous, comment faites-vous ?
L’HYPNOSE
Déjà, vous savez tous amener ce processus. Par exemple, imaginons que vous installez pour lui un bon souvenir. Cette expérience engendre, maintenant, un état de bien-être calme qui fait que, juste à ce moment-là, ni avant ni après, le patient suspend ses tentatives de solutions inefficaces vis-à-vis de lui-même et également vis-à-vis de son interlocuteur, lequel renonce lui-même à son envie de donner des bons conseils ou des exhortations.
Le risque principal a lieu juste après la transe, lorsque votre patient retrouve avec vous son monde ordinaire et qu’il est fréquemment amené à vous dire : « Docteur, c’était agréable votre relaxation, mais après ? » C’est justement à ce point précis que, quelquefois, vous ne savez pas trop quoi répondre et que vous désespérez vous-même, votre proposition d’une expérience confortable d’hypnose vous apparaissant alors comme une tentative de solution insuffisante et inefficace contre le mur trop haut de la dépression.
C’est à ce moment-là qu’il est important, pour continuer le processus thérapeutique, d’initier une conversation d’engagement pour lui faire percevoir que ses modalités habituelles de fonctionnement sont beaucoup plus actives et délibérées qu’il ne le croit.
VIGNETTE CLINIQUE : JUSTE APRÈS LE BON SOUVENIR
-Thérapeute : « Comment vous sentezvous, maintenant ?
- Patient : Bien.
- Th. : Pouvez-vous, avec votre main, me montrer le centre de ce “se sentir bien” ?
- P. : C’est là. Il pose alors sa main sur le haut du thorax.
- Th. : Que diriez-vous : plus léger, soulagé, quoi d’autre ?
- P. : Soulagé.
- Th. : OK. Maintenant, comment voyezvous la suite ? Est-ce que, à votre avis, vous allez sortir guéri, ou bien allez-vous recommencer à ruminer, à broyer du noir, ou bien tout ce que vous êtes amené à faire d’habitude ?
- P. : Ouais, ça va recommencer.
- Th. : Est-ce que vous pouvez me dire quand ça va recommencer ? Est-ce que ce sera parce que vous allez retrouver votre oppression dans la respiration, est-ce que ce sera parce que vous allez recommencer à imaginer le mur noir qui est devant vous, est-ce que ça va être parce que vous allez voir devant vous la liste de tous les “il faut que” qui vous attendent, ou bien n’importe quoi d’autre ?
- P. : Oui, c’est un peu tout cela.
- Th. : Si je comprends bien, vous allez vous dire : c’est plus fort que moi, je ne peux pas affronter cela et je préfère laisser tomber.
- P. : Exactement !
- Th. : Donc, si je comprends bien, en sortant d’ici, ou bien même avant, vous savez que vous allez décider de laisser tomber dans le but de vous protéger de ce que vous envisagez comme pire ?
- P. (hésitation...) : Oui.
- Th. : Dites-moi, imaginez que vous avez une conversation avec une personne de votre connaissance qui vit le même enfer que vous. Imaginez que cette personne vous dise qu’elle est allée voir un thérapeute, qu’elle s’est sentie mieux et que, ensuite, plutôt que d’en profiter pour augmenter ses efforts, elle a préféré laisser tomber tout de suite plutôt que de continuer à faire des efforts comme d’habitude. Qu’est-ce que vous penseriez à propos de cette personne ?…
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Dr Alain Vallée Après une carrière de psychiatre hospitalier, il a exercé comme psychothérapeute. A enseigné l’hypnose et les thérapies brèves dans plusieurs DU ainsi que dans divers instituts français et étrangers. Auteur de nombreux articles et d’un livre paru en 2017 : « Nouveau cours de TOS, dialogues et récits », éditions Satas, Bruxelles. Président de l’AREPTA - Institut Milton Erickson de Nantes.
Un passeur de vie. De Julien BETBÈZE en hommage à Alain Vallée.
Cette formation liant l’hypnose et l’esprit des thérapies brèves lui ouvre de nouvelles perspectives qu’il cherche à approfondir avec Michel Kerouac, puis avec Steve de Shazer en 1994 : « Je me souviens encore avec surprise et délectation d’une situation de supervision à propos de la dépression résistante au cours de laquelle je jouais le rôle d’un de mes patients dépressifs. Lorsque Steve de Shazer m’a fait raconter ma journée dans le détail, quelle n’a pas été ma surprise lorsque j’ai avoué “mettre du ketchup” dans les pâtes […] encore insipides l’instant d’avant. J’ai beaucoup appris ce jour-là » (1). Les collègues présents se rappellent tous comment le visage d’Alain s’est profondément modifié, passant d’une hypomimie dépressive au sourire malicieux de l’enfant plaintif pris avec le doigt dans le pot de confiture. L’irruption de la sauce tomate sur des pâtes insipides a été une véritable expérience émotionnelle lui permettant de comprendre qu’une simple question peut ramener à la vie, ce qui l’amènera par la suite à vouloir transmettre la puissance d’un questionnement ajusté dans son enseignement. Suite à cette expérience fondatrice, Alain a le courage de quitter l’hôpital et son statut de psychiatre hospitalier reconnu pour s’installer en ville afin de pratiquer l’hypnose et la thérapie orientée solution dont il deviendra l’un des meilleurs spécialistes français.
La rencontre avec Steve de Shazer renforce son désir de créer une structure centrée sur les thérapies actives afin de partager le plaisir à pratiquer les thérapies brèves. Dans cette optique il sera à l’initiative de la création de l’ARePTA (Association régionale pour une thérapie active, qui deviendra également l’Institut Milton H. Erickson de Nantes), lui permettant d’intégrer le travail de François Roustang et de Steve de Shazer sur le corps relationnel comme un véritable renouvellement de la pensée psychopathologique.
A l’ARePTA, Alain a toujours incité chacun à garder sa propre créativité : le respect de la diversité des points de vue et de l’expérience singulière des formateurs était essentiel pour lui. Généreux dans l’échange et dans la transmission, il mettait au centre de son attention toute idée dont il sentait la justesse. « Depuis bon nombre d’années, je tente de transmettre l’idée et l’expérience de la simplicité, voire du minimalisme » (2). Alain se méfiait des théories compliquées et de la fausse unanimité des discours vides, il préconisait la curiosité et souhaitait à chacun de « dé-coïncider » du discours convenu, l’amour suffit : « La compréhension engendre la sympathie, la sympathie appelle l’amour et l’unité. C’est cela accepter » (3).
Notes
1. Alain Vallée, Manuel pratique de thérapie orientée solution, Bruxelles, Satas, 2017.
2. Alain Vallée, Hypnose de l’acceptation, Toulouse, Erès, à paraître.
3. André Comte-Sponville, De l’autre côté du désespoir, Paris, Accarias-L’Originel, 1997.
«Oh non, pas lui !». Gérard OSTERMANN en hommage à Alain Vallée.
Ma première pensée bien ancrée dans le coeur s’adresse à son épouse Catherine et à ses fils Julien et Antoine.
Comme tout un chacun, nous voyons notre entourage (proches ou relations) disparaître petit à petit, fauchés par le temps, et ce qui lui est relié : vieillesse, maladies, accidents. Les ornières du sentier sur lequel chacun avance se comblent de souvenirs au fur et à mesure qu’il aborde des crêtes désertifiées et nos émotions seules peuvent encore nous tenir lieu de compagnes dans la solitude qui s’installe et nous glace. Alors, fatalement, se pose un jour la question de l’à quoi bon ! Les étais de la simple logique ne suffisant plus à nous tenir debout, il faut y ajouter non du sens, mais des sensations, en comblant les vides avec quelques prothèses (ou, au choix, un crayon à papier) pour continuer à croquer modestement la vie. Combattre l’absence et le vide par la chimie et la méditation, bâtir des ponts sur le vide, se construire sans illusions un présent Potemkine... et transformer sa vie en mutant son existence de l’actif bouillonnant au passif apaisé. Sans illusion(s). Voilà tout ce qui nous est accordé !
Aujourd’hui, nous nous réunissons nos plumes pour rendre un vibrant hommage à un grand psychiatre, un homme d’une grande humanité et un pionnier dans le domaine des thérapies brèves.
Alain, ton départ laisse un vide immense dans nos coeurs et dans le domaine de la psychiatrie et la thérapie. Je sais ce que tu m’aurais répondu : « Laisse s’écouler la sensation de l’émotion. » Tu as consacré ta vie à aider les autres, à écouter leurs souffrances et à apporter un soulagement dans leurs vies tourmentées. Ton empathie inébranlable et ta compassion ont touché de nombreuses personnes, leur redonnant espoir et confiance en un avenir meilleur. Tes patients se souviendront toujours de tes paroles réconfortantes et de ta présence rassurante. En tant que pionnier dans le champ des thérapies brèves, tu as ouvert de nouvelles voies pour le traitement de la souffrance. Ton approche novatrice a permis à de nombreux patients de trouver des solutions rapides et efficaces à leurs problèmes. Ton travail a inspiré de nombreux autres professionnels de la santé mentale et continuera d’influencer les générations à venir. Au-delà de ton expertise professionnelle, tu as été également un être cher, un ami fidèle et un modèle de bienveillance. Ta générosité et ta gentillesse ont touché tous ceux qui ont eu la chance de te connaître. Ton sourire chaleureux et ton sens de l’humour ont illuminé nos vies.
Dans la tristesse et le regret de son départ prématuré, Nous rendons hommage à Alain, grand psychiatre éclairé, Spécialiste de l’hypnose et des thérapies brèves, Un humaniste et pédagogue qui a marqué les esprits sans trêve. Alain, tel un Victor Hugo de notre temps, A su éveiller les consciences en un instant, Par sa plume experte, il a tracé des chemins, Vers la guérison, l’épanouissement et le bien. Dans l’art de l’hypnose, il était un maître, Révélant les ressources cachées, libérant les êtres, Par ses mots choisis, il ouvrait les portes de l’inconscient, Pour apaiser les maux, panser les blessures, en un instant. Sa passion pour les thérapies brèves était sans égale, Il savait que le temps était précieux, vital, En quelques séances, il trouvait la clé, Pour que chacun puisse retrouver la sérénité. Mais Alain était bien plus qu’un expert, Un humaniste au coeur ouvert, au regard sincère, Il écoutait les histoires, les souffrances, les douleurs, Et offrait son soutien, sa compréhension, sa chaleur. Il éclairait les esprits, levait les voiles de l’ignorance, Pour que chacun puisse trouver sa propre renaissance. Hélas, la vie lui a arraché prématurément, Mais son héritage perdurera éternellement, Dans les coeurs de ceux qu’il a touchés, inspirés, Par sa bienveillance, son humanité, sa volonté. Son départ laisse un vide immense, un regret, Mais son oeuvre continuera de briller, Comme une étoile dans le ciel, pour l’éternité.
Mon cher Alain,
Mon regretté ami David Servan-Schreiber avait écrit juste avant de partir : « on peut se dire au revoir plusieurs fois ». Pour ma part, j’ai envie de te dire « bonjour à nouveau ». Comme tu as pris de l’altitude, beaucoup d’altitude, j’ai imaginé ton voyage céleste : saint Pierre t’accueille et te dit : « Alain, soyez le bienvenu, nous vous avons réservé une place entre Baruch Spinoza et Milton Erickson. Vous pourrez ainsi discuter pendant l’éternité ». J’ai alors deviné ta réponse : « merci infiniment, mais il nous faudra bien un jour de plus ! ».
La mort met fin à la vie, mais pas à la relation. La tradition juive insiste sur le fait que la présence au monde d’un disparu reste solidement accrochée à nos vies grâce aux mots. Ainsi en témoigne la magnifique prière des morts qu’est le Kaddish, qui dit : «Puisse son âme être tissée aux fils de nos vies.»